Chronique film : Bright Star

de Jane Campion.

 

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C’est de la dentelle végétale…bon ça va, hein…
Clique. 

Il y a des aveux plus faciles que celui que je m’apprête à faire. Mais quand il faut y aller… Bon je me lance. Alors oui, moi, j’avais beaucoup aimé la Leçon de Piano (et même Portrait de femme, et même Holy Smoke). Et pour m’enfoncer encore plus : oui, j’ai fait partie de ces adolescentes gnangnans qui ont joué (massacré) la bande originale de La leçon de piano sur leurs claviers rétifs. Voilà, ça c’est fait. C’est donc avec un peu d’appréhension que je suis allée voir Bright Star. Et Campion m’a encore une fois méchamment chopée. Le film n’est certes pas exempt de défauts et de longueurs, mais il tient quand même bien la route et réussit ce à quoi il est destiné : émouvoir.

Campion a très bien choisi son sujet, il était cousu sur mesure pour elle. Il s’agit de l’histoire d’amour (platonique, faute de mariage) entre le grand poète romantique Keats et une jeune fille de bonne famille passionnée de couture, à la langue bien pendue. Elle qui ne voit la vie qu’à travers ses étoffes et colifichets se trouve très intriguée par cet homme pour qui le matériel ne compte pas, et qui ne vit que pour la passion des mots. Le film ne raconte finalement pas grand chose que la naissance et la mort de cet amour.

Campion réussit quelque chose de très beau dans sa manière à la fois très moderne et classique de filmer son sujet. Débarrassée de ses tics de cadres tarabiscotés (là elle filme droit), elle évite les effluves de naphtaline : pas de filtre orange, flou ou sépia ici, non. La lumière est naturelle, les couleurs sont pures. Cette manière de filmer un film en costume, finalement sans artifice photographique, est très rare et très juste. Elle sort le film de la reconstitution poussiéreuse pour en faire une histoire intemporelle. Campion utilise la lumière comme un pinceau, révélateur des sentiments des personnages et surtout de leur destin. Elle puise son inspiration dans les toiles

de maîtres et esthétiquement, c’est une merveille. Que la caméra filme au plus près des corps et des choses, ou en plan large sur les merveilleux paysages anglais, le film est empreint d’une très belle sensualité. C’est l’éveil des sentiments, l’éveil des sens et l’éveil du corps que nous raconte Jane Campion et elle le fait avec la candeur et la joliesse de ses personnages.L’évolution de ses héros se fait au rythme des saisons, et quand la jeune fille apporte à Keats un rameau d’arbre en fleur au printemps, mon petit coeur a fait boumboum. Quelques symboles de ce style, un peu trop faciles, mais amenés avec une belle évidence, sont dispersés dans le film, tels ces papillons (créatures éphémères) qui parsèment la chambre de l’héroïne à la joie exubérantes après la lecture d’une lettre de son amour.

Alors bon, on passe outre les petites faiblesses du film : un peu trop long, avec un Keats assez pâlichon, et on se laisse prendre par cette belle manière de nous parler de la naissance de l’amour. Lumineux et sensuel.