Chronique livre : La très bouleversante confession de l’homme qui a abattu le plus grand fils de pute que la terre ait porté

d’Emmanuel Adely.

moi je préfère être complètement mort en morceaux plutôt que de me balader avec un demi-sac de burnes t’en penses quoi toi

latresbouleversanteJ’ai lu ce livre il y a un sacré bout de temps, mais les récents événements m’ont donné envie de vous en parler rapidement. La très bouleversante confession… c’est une plongée terrifiante dans la tête des soldats qui ont mené l’opération d’élimination de Ben Laden. Emmanuel Adely se fond dans ces esprits, capte leur langue, leur rythme interne, leurs préoccupations, leurs obsessions. Continuer la lecture de Chronique livre : La très bouleversante confession de l’homme qui a abattu le plus grand fils de pute que la terre ait porté

Chronique livre : Paris est un leurre – La véritable histoire du faux Paris

de Xavier Boissel.

Cela requiert un autre regard, (…) : c’est dans la sédimentation et la désagrégation du paysage qu’il s’agit de débusquer des moments de vérité, quitte à danser avec les spectres, dans la pénombre des illusions.

parisestunleurreL’histoire est fascinante comme l’est souvent l’anecdote. La première guerre mondiale voit apparaître une nouvelle forme de destruction, les attaques aériennes. Afin de protéger Paris, un plan a priori délirant est mis aux point et les manettes confiées à un ingénieur spécialiste de l’électricité, Jacopozzi. Il s’agira donc de construire des répliques de certains quartiers de Paris, dont les matériaux et surtout les éclairages permettraient de détourner les attaques aériennes nocturnes de leur véritable cible. Trois sites de banlieue sont choisis pour leur faible population et leur géographie proche de l’originale. Les travaux démarrent uniquement sur un site, la fin de la guerre vient mettre un point d’arrêt à ce projet pharaonique. Continuer la lecture de Chronique livre : Paris est un leurre – La véritable histoire du faux Paris

Chronique livre : La cité des oiseaux

d’Adam Novy.

lacitedesoiseauxVoici un objet-livre original et beau avec son format presque carré et sa belle couverture blanche et rouge, un visuel qui n’est pas étranger à mon achat.

La cité des oiseaux nous plonge dans un univers ravagé par la guerre et envahi par les oiseaux. Cet univers est replié, l’Oklahoma se trouve voisin de la Norvège, de la Hongrie ou de la Suède dans une distorsion spatiale curieuse, l’époque est incertaine, sans doute un futur, mais pas forcément lointain, les quelques éléments permettant de dater l’histoire semblent très actuels, voir même légèrement désuets. Continuer la lecture de Chronique livre : La cité des oiseaux

Chronique livre : Ma dernière création est un piège à taupes – Mikhaïl Kalachnikov, sa vie, son oeuvre

d’Oliver Rohe

Voilà un bouquin terriblement futé et affûté, malin comme ça n’est pas permis, et véritablement passionnant. Ceux qui me connaissent un peu seront probablement étonnés de me voir lire un tel livre: je tremble devant la moindre tapette, considère le couteau à pain comme une arme de destruction massive, et pleure pendant trois semaines, lorsqu’à bout de nerfs, je me vois contrainte de tuer une souris à coup de granulés empoisonnés. Un livre sur l’inventeur de l’AK-47, c’était donc un peu beaucoup de violence armée pour la lectrice que je suis. Mais la manière de procéder d’Oliver Rohe vaut son pesant de munitions.

L’auteur a choisi trois points de vue pour raconter le périple de cette arme : la biographie de son inventeur, l’histoire de l’arme elle-même ou plutôt l’évolution de l’arme dans l’Histoire et enfin, la description d’images emblématiques de l’usage de cette arme et de sa portée symbolique. De ce croisement, cet entremêlement entre le biographique, l’historique et la représentation d’un phénomène, naît une réelle profondeur, une vision en 3D du sujet. La vie de Kalachnikov révèle un ingénieur quasi-autodidacte, dont la folie monomaniaque créatrice et perfectionniste, est finalement à la (dé)mesure de l’histoire de l’arme qu’il a inventée. Cette folie créatrice, de l’arme idéale, a “porté ses fruits”, puisque l’utilisation massive et durable de l’AK-47, encore aujourd’hui est à la hauteur de l’intransigeance et de l’efficacité de son créateur. Mais tout l’intérêt de l’étude de l’histoire du fusil, c’est cette inversion symbolique de son utilisation, révélateur de l’évolution de la société. Tout d’abord arme purement communiste, puis “récupérée” par les groupuscules révolutionnaires de tous types, l’AK-47 est aujourd’hui un véritable symbole capitaliste, une marque de fabrique, dont les ventes et le trafic rapportent des sommes phénoménales. Glaçant.

L’écriture d’Oliver Rohe sobre, efficace, directe, n’est pourtant jamais asséchée. Et la construction alternée du récit en apporte tout le sel et la profondeur. Belle découverte.

Ed. Inculte fiction

Chronique livre : Plaidoyer pour l’éradication des familles

de Stéphane Legrand

Voilà un des livres les plus grinçants qu’il soit, du genre à ne pas lire dans le train au retour des fêtes de fin d’année sous peine de recevoir des coups d’oeil mi-meurtriers mi-envieux des passagers de tout un wagon (c’est du vécu).

Notre narrateur nous explique par A+B pourquoi il faut éradiquer la famille, ayant par ailleurs joyeusement éradiqué la sienne. Alternant des chapitres « essai » et des chapitres « récit », Plaidoyer pour l’éradication des familles fait mal.

Dans la partie « essai », le narrateur déconstruit l’idée de la famille, bâtissant progressivement une argumentation socio-philosophique amenant à reconsidérer les fondements même de la société. N’ayant pas véritablement de culture en sociologie ou philosophie, et Stéphane Legrand étant un petit malin fort talentueux et intelligent, bien difficile en effet de se prononcer sur la pertinence des démonstrations de l’auteur. Il utilise un jargon obscure dont on ne sait vraiment s’il camoufle une pensée lumineuse ou un foutage de gueule total. Quoi qu’il en soit, c’est profondément méchant, brillamment lucide, parfaitement vénéneux, et surtout très drôle.

Malheureusement, la partie « récit » vient un peu affadir l’extrémisme de la partie essai. Dans ces chapitres en effet, on comprend que l’auteur des réflexions dont j’ai parlé précédemment, est un fou, enfermé dans un asile, et qui n’a qu’un but dans la vie s’échapper de sa prison pour mettre à exécution ses préceptes. C’est là que le bât blesse. Si toutes les réflexions sur la nécessité d’éradiquer la famille sont proférées par un aliéné, évidemment, on ne peut leur accorder que peu de crédit (à part être fou soi-même, ce qui ne serait pas une grande découverte). On a l’impression que Stéphane Legrand se planque derrière son personnage pour ne pas avoir à assumer toute la déviance de sa pensée.

Le volet « asile » semble par conséquent assez facultatif, il n’ajoute pas grand chose à l’intérêt de ce livre, absolument imprescriptible, et donc totalement essentiel.

Ed. Inculte Fiction