Chronique livre : Corpus Delicti – Un procés

de Juli Zeh.

Vous allez me dire pourquoi lire Corpus delicti, alors que ma première confrontation avec la prose de Zeh ne fût pas tellement convaincante ? C’est que j’avais déjà acheté ce livre, et que plutôt que de le laisser moisir au fin fond de ma pile à lire, j’ai préféré me l’avaler rapidement. Ca c’est de l’explication.

Bon, il faut avouer que Zeh n’est pas sans imagination, et sans talent pour titiller un peu l’appétit du lecteur. Corpus delicti est suffisamment futé dans son sujet, et surtout beaucoup plus resserré dans sa trame que La fille sans qualités, pour ne pas (trop) lasser. La réussite de Zeh, c’est la création de ce futur dans lequel la société est dirigée par “La Méthode”. La Méthode, c’est une réglementation ultra-hygiéniste, qui considère que le bonheur de la majorité, repose sur la santé individuelle. Dans cette société, il n’est donc pas question de tomber malade, de procréer avec n’importe qui, ou d’aller se rouler nu dans le foin. Non. Il faut tester ses urines et son sang quotidiennement, faire sa dose d’exercice physique tous les jours, se choisir un compagnon au système immunitaire compatible, et ne pas sortir des limites de la ville. Dans cet univers étouffant, Juli Zeh fait évoluer trois personnages principaux : Mia, une biologiste qui a des difficultés à accepter la mort de son frère (pas bien), un journaliste fouille merde, adepte de la Méthode, et l’avocat de Mia, dont les bonnes intentions se retourneront contre sa cliente.

Comme dans La fille sans qualité, on retrouve beaucoup de dialogues dans Corpus delicti, de gens qui réfléchissent, qui philosophent, et surtout un procés. Mais, Juli Zeh a clairement progressé dans la construction du récit par rapport au précédent roman. Beaucoup moins bavard, beaucoup plus court, beaucoup moins référencé, elle réussit à créer un roman d’anticipation intéressant qui soulève un certain nombre de questions, sans pour autant porter de jugement de valeur, ni imposer de réponses. Bien sûr l’univers est complètement totalitaire, il interdit tout décrochage, toute sortie de route, certes, la Méthode est passablement étouffante, mais après tout, elle assure le bonheur du plus grand nombre, alors pourquoi résister ? Mia tente de démontrer les dérives du système, et finalement, y échouera. Ce final grinçant à souhait est sans doute le meilleur du bouquin, et permet de le lâcher avec une impression favorable.

Parce que, outre son sujet intéressant, Corpus delicti, d’un point de vue littéraire, ce n’est vraiment pas grand chose. Je ne sais si ça vient de la traduction, mais, à l’image de La fille sans qualités, ce roman est effroyablement mal écrit. C’est quasiment une torture de réussir à s’enquiller ces phrases maladroites, souvent peu claires. Pourtant Zeh y met beaucoup d’énergie et d’intelligence, mais non, elle ne sait pas écrire. J’ai passé tout le bouquin à me dire que sous la plume d’un écrivain, le livre aurait pu être génial. En l’état, il a un petit côté mal fini, mal dégrossi, quasiment immature. Bref, intéressant, en progrès, mais pas encore ça.

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