de Fernando Trueba et Javier Mariscal.
Le film débute à La Havane en 1948. Chico, pianiste de talent et désargenté, toujours suivi à la trace par son manager, rencontre la voluptueuse Rita, qui chante dans des bars pour gagner sa vie. Entre eux, c’est je t’aime moi non plus, et leurs itinéraires n’en finissent pas de se croiser sans jamais vraiment réussir à se mêler. Le star système les prend en main. Rita devient une star hollywoodienne, tandis que Chico mène une carrière plutôt réussie de pianiste. Jusqu’au jour où.
Raconter une histoire d’amour en dessin animé, une vraie, difficile, drôle, sensuelle, voilà qui est plutôt culotté. Le trait de crayon pour représenter les visages est assez simpliste, et rentrer dans le film n’est pas forcément très évident. Malgré la belle sensualité des protagonistes, on a un peu de mal au départ à adhérer au jeu de la séduction entre nos deux héros et aux scènes chantées. Mais la gène est seulement passagère, et petit à petit on pénètre dans cette histoire du chat et de la souris avec délices. Le dessin devient progressivement une force, et donne au film un caractère poétique. Les personnages deviennent des symboles des gens simples confrontés à l’injustice, pions dans les mains de gens âpres au gain et d’un système qui, pour un seul faux pas, est capable de les broyer.
On peut également admirer la manière extraordinaire de dessiner les villes, de la Havane, à Paris en passant par New York ou Las Vegas. De belles atmosphères s’en dégagent, des ambiances différentes quand on change de lieu, et ce voyage dans le passé, sans être nostalgique de mondes perdus, est très agréable. La “caméra” navigue avec fluidité et sensualité dans ces décors, et tout le talent des réalisateurs se déploie dans les scènes musicales, excellentes et magnifiées par la musique dynamisante de Bebo Valdés (dont la vie a librement inspiré l’histoire du film).
Quand le film se termine, on est très ému par cette histoire simple et pourtant extraordinaire, d’un amour contrarié par les petites histoires et par la grande. Un film d’animation hors de la bouillie pré-mâchée habituelle, bien bien.