d’Andrea Arnold.
Tu as raison petit, fuis fuis, et ne te retourne pas !
Et toi lecteur, clique.
J’ai un peu attendu pour voir ce film, de peur que ce soit une énième chronique Loachienne de l’adolescence misérable dans les banlieues anglaises. J’avais tort. Fish Tank m’a foutu une patate pas possible tant il y a de vie là-dedans, d’énergie, de force.
Certes il s’agit bien de l’histoire d’une ado dans une banlieue misérable anglaise. Mais si le contexte social est bien présent, il ne sert en fait que de support, de ferment à l’histoire de Mia (incroyable Katie Jarvis), 15 ans, mal embouchée, mal polie, violente, intenable, à la fois enfantine, et mature, qu’on autant envie de baffer que d’aimer. Pas difficile d’expliquer le comportement de Mia : un quartier pourri, une mère instable et immature, un gros manque d’éducation, la nécessité de s’imposer pour survivre … même si tous ces éléments sont bien présents, ce n’est pas ça qui intéresse Andrea Arnold. Plutôt que d’exposer longuement la misère, elle colle aux basques de Mia. Et ça va vite. Mia marche, court, danse. Mia frémit du haut de ses 15 ans et de ses hormones agitées. Mia fait parfois n’importe quoi, mais elle vit. La réalisatrice saisit les moindres émotions de l’ado, capte son énergie. Elle réussit à ne pas sombrer dans le piège du naturalisme brut, et se permet des échappées poétiques, sensibles qui suivent les émotions de Mia (superbe scène de kidnapping dans l’estuaire de la Tamise).
On peut sans doute lui reprocher une certaine lourdeur symbolique (la tentative de libération du cheval blanc, mouarf) et un recours un peu trop fréquent au ralenti pour souligner l’éclosion de la sensualité… cependant, force est de constater que ça fonctionne, et qu’on est suspendu à la caméra, comme au souffle de l’héroïne. La dernière scène est magnifique, une scène sans parole entre la mère (impuissante, enfantine, dévastée par le chagrin), Mia (cheveux détachés, comme le signe d’un passage à l’âge adulte), et la petite soeur (qui suit le chemin de son aînée). Elles dansent ensemble, ensemble pour la première fois depuis le début du film.
Et ça n’est qu’à la fin qu’on repense au volet social, en constatant qu’une société qui gâche une si belle énergie, qui est incapable de se rendre compte du potentiel à côté duquel elle passe, est une société à l’agonie. Un superbe moment en tous cas. L’a bien mérité son prix du jury à Cannes Andrea !