Chronique film : Mémoires de nos pères

(Flags of our fathers – FOOF pour les intimes)  de Clint Eastwood

Chers lecteurs, je suis tiraillée. D’une part, il y a un film de guerre de 2h30, genre que je déteste (hyper-sensibilité, mêlée à une incapacité totale à comprendre les méandres scénaristiques des films de guerre et d’espionnage). D’autre part il y a Clint Eastwood, mon amour de toujours, qui n’a toujours pas répondu à mes 274 demandes en mariage (je sais, je sais, il se fait plus tout jeune, il faudrait peut-être qu’il se grouille).

Bon.

Mon amour (pour Clint) a été plus fort que mon dégoût (des films guerriers), et je suis allée au charbon. FOOF est déroutant de part sa construction (scénario? montage?). En gros, durant la grande bataille de l’île d’Iwo Jima (US versus Japan), une photo est prise de 6 soldats en train de hisser un drapeau américain sur le point haut de l’île de bataille. Les caisses de l’Etat américain étant à sec, cette photo va servir au gouvernement à remobiliser les fonds nécessaires à la poursuite de la boucherie. Pour cela le gouvernement rapatrie 3 soldats présents sur la photo (ben ouais, les autres sont morts), les hisse au statut de héros (fort éphémère), et les exhibe comme des bêtes de foire pour ramasser des pépettes.

Le début est assez difficile à suivre, mélange de flash-back, de flash-front (oui je sais ça existe pas), on navigue entre plusieurs époques (3) et dans chaque période plusieurs événements. Inhabituel chez Clint, cette construction non linéaire. Certains y ont sûrement vu des maladresses, en ce qui me concerne, je dois avouer que, si au début, j’étais perdue, le dispositif se met en route progressivement, pour atteindre un efficacité redoutable par moment (association d’idées, réminiscences, … plutôt intelligent tout ça).

Les acteurs sont particulièrement falots et inexistants, et c’est exactement le but recherché : la thèse défendue est que les héros n’existent pas, et ne sont que des créations de la société.

Visuellement c’est magnifique. L’image est désaturée (on est quasiment en Noir et Blanc, enfin plutôt en verdâtre/gris foncé/gris clair), où seules ressortent les touches (rares) de rouge (le sang, les néons des bars, le coulis de fraises, le rouge à lèvre des dames et… le rouge du drapeau américain). On est en permanence en contre-jour, ou clairs-obscurs (un peu comme dans Million Dollar Baby), et c’est magnifique. La flotte des Marines entourant l’île, est vraiment impressionnante, une grande réussite visuelle. Réussies aussi les scènes de guerre (même si berk quand même). Il y a des plans magnifiques, comme ce soldat seul, perdu au milieu d’un champ de bataille dévasté, où seule résonne la voix lointaine d’un autre soldat qui appelle l’infirmier. Poignant (on se croirait dans Cris de L. Gaudé).

Mais alors, y’a quand même un truc… Bon, je sais bien que le film a dû coûter très cher… Je sais bien que c’est jouissif de composer de la musique… mais quand même… Clint, s’il te plaît, arrête de composer toi-même ta musique ! D’abord, tu fais toujours la même chose, et pis, c’est un peu de la soupe ta musique, faut être honnête.

Le bilan de tout ça : ben je n’aime toujours pas les films de guerre, je suis encore plus anti-militariste qu’avant, mais FOOF est plutôt un bon film, même si ce n’est pas du très grand Clint. Pour juger vraiment, il faut aussi attendre la sortie de la deuxième partie du projet : la même histoire, mais vue du côté japonais. Au fait, surtout ne partez pas avant la fin du générique (par ailleurs poignant).

Pfff pas le moral moi, avec tout ça, et pis la France vient de se prendre une énorme branlée rugbystique face aux all-black… C’est pas drôle. Envie d’un gros câlin ce soir…

PS : critique du deuxième volet de la saga ici.