Chronique livre : Les vertes collines d’Afrique

d’Ernest Hemingway.


Clique la vache.

Ahhhh ça fait mal de devoir dézinguer un mythe, mais voilà, Les vertes collines d’Afrique est un bouquin tout à fait détestable. Pas par son écriture : magnifique de concision, de précision. Les dialogues notamment sont incroyables, pleins de fougue, de mouvement, de vie. Mais Hemingway, comme il le dit dans sa préface « a essayé d’écrire un roman absolument sincère ». Et là, c’est le drame. Je vais probablement etre traitée de moralisatrice, mais le personnage autobiographique qu’il révèle étant absolument détestable dans sa superficialité travaillée, son cynisme, sa volonté absolue à ne prendre aucun recul sur ses actes, et même à les justifier en toute (fausse)-bonne conscience, lorsqu’il sent qu’il va trop loin : « Je ne faisais rien qui ne m’eût été fait à moi. » Hemingway chasse le gibier africain, il adore la chasse, sans culpabilité, jusqu’à l’obsession, et n’a de cesse d’exterminer antilopes après rhinocéros, lions, buffles, koudous, autant, voire plus que ce que ne lui autorise son permis de chasse. Le roman n’est que ça, une succession de traques, heureuses ou non. On chasse pour la viande, certes, mais surtout pour les cornes qui doivent être les plus imposantes possibles.

Hemingway reste incroyablement superficiel dans sa description de l’environnement. Il porte un regard entièrement subjectivisé par son amour de la chasse, et laisse de côté toutes considérations environnementalistes (à part une très brève éclaircie à la toute fin du roman « Un continent vieillit vite quand nous y arrivons.« ) On est très loin du magnifique Lion de Kessel de ce point de vue là. Ce n’était certes certainement pas le but : plus qu’il se doit d’être sincère, il ne narre que ce qu’il a sincèrement vécu, c’est à dire sa sincère passion cynégétique. Finalement, dans Les vertes collines d’Afrique Hemingway se définit lui-meme plus chasseur qu’écrivain, l’écriture ne lui permettant que de gagner sa vie pour se payer ses escapades giboyeuses. Et c’est à croire qu’il n’a pas tort quand il dit que « tous les chasseurs sont les mêmes« . Sait-on jamais, il y a sans doute des Nobels qui s’ignorent dans les hommes aux casquettes kakis qui transforment les balades dominicales en forêt en jeu de roulette russe.