Chronique film : La Comtesse

de Julie Delpy.

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« Rien ne fait plus mal que d’être trahie par l’homme qu’on aime » dit la Comtesse Bathory en voix off, comme pour expliquer les raisons de sa folie. Car cette chère comtesse née en 1560 en Hongrie gère plutôt mal le chagrin d’amour. Au lieu de hurler de douleur en bouffant son oreiller, de lorgner les couteaux, de se taper la tête contre les murs pour essayer de se sentir vivante, elle préfère passer sa rage sur des jeunes vierges, et s’enduire le visage de leur sang virginal dans l’espoir de retrouver sa jeunesse perdue.

On ne peut pas dire que Delpy aime la facilité, et il faut avouer que son goût du baroque sanglant ne pouvait que piquer ma curiosité morbide. Et c’est plutôt une réussite. Formelle d’abord : costumes, lumières sont absolument somptueux. On se croirait chez de La Tour pour les éclairages, mais un de La Tour qui aurait piqué la balance des blancs de Whistler. C’est magnifique et glacé, sans pour autant tenir à distance l’émotion. Sur le fond ensuite, le film étonne. Bien loin de la simple évocation de la sanglante comtesse vaniteuse, Delpy réussit à créer un personnage complexe, fou, mais dont la folie explose lorsqu’elle se sent abandonnée. Elle porte une attention oppressante et intelligemment mise en scène sur la peur de la vieillesse : la comtesse n’a de cesse de traquer la ride, et l’examen méticuleux de son visage renvoie à l’angoisse de l’actrice face à son miroir (Opening Night), et plus généralement à l’angoisse de la femme seule face au temps qui passe.