d’Anne Savelli
Chronique initialement publiée dans l’inestimable revue Dissonances
C’est un livre en provenance des interstices du passé et des pavés de Saint-Germain-en-Laye, une divagation spatiale et temporelle dans la ville bourgeoise perchée sur son belvédère et l’extrémité du RER A. Loin, très loin de la banlieue Est, Saint-Germain exhibe dès la sortie de sa gare tout son
argent, ses ors et la grande histoire.
Le parquet est ciré et les rues toujours propres.
Comment se mouvoir dans ses rues à l’héritage royal lorsqu’on est une enfant, sans trop de père et sans trop d’argent ? Anne Savelli revient dans la ville plus de dix ans après l’avoir quittée. Les souvenirs se mêlent à la (re)découverte des lieux. Réminiscences poétiques, résurgences olfactives, dans un jeu d’attirance et de répulsion envers la ville close, l’auteur dresse en creux le portrait de la ville et de son enfance ni tout à fait dedans, ni tout à fait dehors.
Des cris articulés ou inarticulés dans un corps détourné, retourné, vrillé net. Elle fut empêchée, rattrapée. Ne resta que son cri.
Derrière les apparences lustrées de la cité sourd la violence. Violence physique du voisin qui bat sa femme. Violence du manque d’argent dans une ville qui l’exhibe et exclut ceux qui n’en ont pas.
Marcher ici, c’est ne pas savoir qu’il existe des HLM poussées sans magasins, des tassements, des empilements […]. C’est ne pas vivre, non plus, une entraide possible.
Mais une institutrice amoureuse de poésie et une bibliothécaire imaginative : il y eut pourtant de belles rencontres, de celles décisives qui donnent une direction à la vie. De quoi déverrouiller une porte et envisager la possibilité de l’évasion.
Ed. l’Attente