Chronique film : Tamara Drewe

de Stephen Frears.


Décoratif, et quoi d’autre ?
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C’est avec la ferme intention de dire du bien du cinéma anglais et de m’amuser que je suis allée voir Tamara Drewe (et aussi pour fuir de chez moi le plus longtemps possible, mais ça c’est une autre histoire). Hélas. Que vais-je pouvoir dire de Tamara Drewe ? pas grand chose j’en ai bien peur.

Le film a levé en moi une immense vague d’indifférence morne. Pas de colère, pas d’ennui. Juste de l’indifférence. Pas vraiment drôle, pas vraiment réalisé, pas vraiment joué, je pense juste que ce film n’a pas d’existence réelle. La seule action d’éclat de Frears est la manière magistrale qu’il a de passer à côté d’un beau sujet. Le personnage de Tamara Drewe est sans conteste intéressant, malheureusement phagocyté par l’ensemble des seconds rôles tous pires les uns que les autres. Frears évite avec une grande minutie de centrer son film sur Tamara, à croire qu’elle lui fait peur. Tamara ou le vilain canard transformé en joli cygne par la chirurgie esthétique, consumé par un feu trop grand pour elle qui rejaillit forcément sur les autres. Tamara ou la blessure originelle, l’immense manque affectif initial, capable de tout détruire sur son passage.

Malheureusement Frears ne fait que très légèrement effleurer son héroïne, et préfère se perdre dans des personnages secondaires pas drôles et caricaturaux (horripilantes adolescentes, écrivain queutard, femme dévouée, rocker ridicule…). Pour sauver Frears, on préfèrera revoir le magnifique The Burning, l’intense My beautiful Laundrette, l’intrigant Mary Reilly ou le très drôle The Snapper.

Tamara Drewe est un non-film, non-inspiré avec de non-acteurs. Plouf.

Chronique film : The Queen

de Stephen Frears

Il était temps pour moi de visiter la seule salle de cinéma de Dijon un peu « pointue » (lire : qui passe autre chose que de la VF et des superproductions). Sur un coup de tête, je quitte le boulot et je file au cinéma. Mon choix se porte sur The Queen de Frears. Je n’en ai pas encore entendu causer, je sais vaguement que ça parle de la Reine d’Angleterre, point barre. Mais Frears m’a valu quelques uns de mes plus beaux fous rires de cinéma (Ahhhh The Snapper, The Van), quelques chocs esthétiques (Mary Reilly), quelques bouleversements émotionnels (My Beautiful Laundrette). Le gars n’est pas très facile à cerner, mais son oeuvre est marquée par un beau regard et une grande humanité. Je ne prends donc pas trop de risques. A vrai dire au sortir du film, j’ai trouvé ça sympa, mais voila, maintenant, il me trotte dans la tête.

The Queen commence comme une comédie aigre-douce, personnages proches de la caricature, ou même carrément caricaturaux. Dialogues savoureux (à voir obligatoirement en VO !). Le cadre rigide du protocole royal cache mal la nature de ses protagonistes, marionnettes ou bouffons. De son côté la bande à Tony Blair, est présentée comme une assemblée de jeunes cadres dynamiques aux dents longues, résolument modernes, pas franchement sympathiques non plus. Voir Madame Blair servir du poisson pané à ses mioches dans une cuisine banale, en tablier, est assez surprenant. Je ne connais pas les us et coutumes de la famille Blair, mais j’ai des doutes : je ne pense pas que leur intérieur ressemble à un pavillon de banlieue et que Madame engueule son mari parce qu’il n’a pas fait la vaisselle, mais bon, après tout, je n’en sais rien.

Bref. Le film prend une tournure très différente après la mort de Diana. Tony Blair en profite pour se mettre en avant, tandis que la Reine s’enfouit dans sa résidence secondaire de Balmoral. Pour chacun, cet événement sera un tournant décisif. « Il n’y a jamais eu de précédent » à cet accident, imaginez, une ex-princesse royale qui casse sa pipe, ça ne s’est jamais vu. Tandis que la rancoeur du peuple grandit, envers cette Reine, qui ne veut même pas mettre un drapeau en berne pour leur Princesse de Coeur, c’est tout le monde codifié et rigide de la Reine qui explose, toutes ses certitudes qui volent en éclat. Son seul ami, se révèlera être Tony Blair, qui petit à petit se met à ressentir de l’empathie, et même de la sympathie pour ce personnage écrasé de solitude. Après ses débuts plutôt légers, le film prend un tournant plus tragique, et extrêmement émouvant (oui oui, j’ai même versé ma larme), pas à cause de la mort de Diana, mais pour La Reine, pour nous en fait, et toute personne qui dans sa vie doit affronter une perte de repères et une profonde remise en question (au passage, extraordinaire Helen Mirren, sublime). Ni brûlot pro ou anti-royaliste, Frears ne porte aucun jugement sur un état factuel de la politique anglaise, mais il s’attache à sa protagoniste principale et lui donne une portée universelle. Si c’est pas beau ça !