de Kiyoshi Kurosawa.
Quel bonheur de retrouver le cinéma de Kiyoshi Kurosawa après 5 ans d’absence. Le cinéaste nous avait habitué à une production un peu plus, voire beaucoup plus soutenue. Il revient avec cette adaptation d’un best-seller nippon, diffusée au Japon sous forme d’une mini-série de 5 épisodes, et en France en deux longs-métrages. Shokuzai – Celles qui voulaient se souvenir plante le décor. Cinq petites filles dans une ville de la province japonaise. Une des fillettes, Emili, est kidnappée sous les yeux de ses camarades. La mère fait alors promettre aux quatre fillettes survivantes, incapables de se souvenir du visage de l’assassin, de le retrouver et de payer leur dû. Les enfants se trouvent chargées d’un poids écrasant qu’elles vont toutes gérer différemment, mais toutes, tragiquement. La première partie suit l’itinéraire de deux fillettes, le second, Shokuzai – Celles qui voulaient oublier les deux autres, ainsi que de la mère.
Le cinéaste appréhendait de devoir adapter un best-seller. Le film est pourtant hanté par les obsessions du réalisateur. Culpabilité, poids du destin, vengeance sont les piliers du film. On pense un peu au magnifique Fiorile des frères Taviani dans lequel une malédiction familiale se propageait de génération en génération. Ici c’est également une faute originelle qui se transforme en destin tragique et se transmet, s’insinue dans des enfants innocentes et impactent leur développement émotionnel, psychique et physique.
La mise en scène de Kiyoshi Kurosawa est toute en espace. Elle donne sa place à ses actrices, vraiment formidables. Les quatre jeunes femmes ont des destins complètement différents, délirants pour certains, tous révélateurs de la condition de la femme au Japon, et le réalisateur réussit à créer cinq écrins distincts pour ces quatre femmes et la mère. Ambiances différentes, musiques adaptées à chaque tableau, comme des petites miniatures au sein du film. Shokuzai n’en perd cependant pas sa cohérence, même si on regrette un peu de ne pas l’avoir vu sous sa forme originelle de mini-série.
Sans m’avoir complètement embarquée, sans doute en raison de la forme un peu compacte sous laquelle il nous est parvenu, Shokuzai est néanmoins un film absolument superbe, mystérieux et touchant. Et puis quelle classe et subtilité dans la mise en scène.
Une réflexion sur « Chronique film : Shokuzai »