de François Ozon.
Jaloux non ? Clique.
Mon amour pour Ozon étant très irrégulier, et ayant particulièrement apprécié Ricky, c’est avec une suspicion certaine que je rentrais dans la salle. En général, c’est un sur deux. Mais cette fois ci était une bonne. Le refuge est un film particulièrement simple pour le réalisateur, tournant autour de deux de ses thèmes de prédilection : la perte et la maternité.
Mousse est jeune héroïnomane qui perd son compagnon Louis d’une overdose. A l’hôpital, se réveillant d’un coma, elle apprend le décès de Louis et sa grossesse. Passant outre les recommandations de la famille grande bourgeoise de Louis, elle garde l’enfant, et part dans une maison du pays basque, son refuge, pour vivre sa grossesse. Pendant quelques jours, le frère cadet de Louis vient lui rendre visite. Et c’est une belle rencontre que celle de cette femme sans mari (« vous n’êtes quand même pas la Vierge Marie ? » lui demande un dragueur de passage) et de cet homme sans mère (il a été adopté). Elle qui n’est pas encore sortie de l’enfance, à chercher encore et encore la chaleur de la matrice (sa maison, son bain, le parquet, le champ…), à demander à un amant de passage de la bercer (cette scène m’a terrassé), va enfanter. Mais pour des raisons qui ne sont pas l’amour maternel. A la mort de Louis, elle s’est sentie investie de lui, le portant dans son ventre. Mais c’est un leurre, et la grossesse se déroule comme si l’enfant n’existait pas vraiment. Mousse est encore trop immature pour cet enfant. Et Paul, le frère de Louis, est curieux de cette vie, de cette grossesse. Lui qui n’a pas connu sa vraie mère, et qui a peu de chances d’être père (il est homosexuel), cherche en Mousse quelque chose qu’il ne connaît pas.
Ce sont deux marginaux, qui se cherchent encore et s’apportent mutuellement les choses qui leur manquent : elle une figure masculine, lui une figure maternelle. Ozon réussit à faire un film d’une très grande douceur, apaisé, mais sans niaiserie. Il y a des scènes très dures dans Le refuge (le scène de l’overdose, la scène chez les beaux parents, ou l’attention d’une femme sur la plage qui tourne vite en folie), les personnages sont fondamentalement imparfaits, incomplets. Mais il émane de l’ensemble un vrai amour, une belle tendresse dans le regard d’Ozon à l’égard de ses héros, ce qui n’avait pas toujours été le cas jusqu’à présent. Et le geste final de Mousse n’apparaît pas comme un abandon, mais comme une transition, un geste finalement de quelqu’un qui grandit et réfléchit, et qui a enfin décidé de se construire.
La caméra d’Ozon est plus limpide que dans ses précédents films. Plus naturaliste, elle gagne aussi en légèreté. Lumières naturelles très belles, jeux de miroirs sur ces êtres inachevés, c’est vraiment beau. Et l’acteur qui joue Paul a un côté Rohmerien qui passe ma foi très bien. Certes pas un film tape à l’oeil, mais un très bon moment, émouvant, suspendu. Parfait.