de Michel Layaz.
Chronique publiée initialement dans le numéro 32 de l’indispensable Revue Dissonances.
Il promène sa drôle de silhouette le long de ces pages, Louis Soutter, violoniste de formation, issu d’une famille aisée, un jour marié et installé, le lendemain (encore dans la force de l’âge) envoyé pour toujours à l’asile par sa famille. Là, Louis est malheureux, il s’enfuit, il revient, mais surtout il dessine et ses dessins l’ont fait entrer dans la postérité. Que s’est-il passé ?
Côtoyer Louis ne laissait personne indemne. Sa sensibilité à vif, constamment imprévisible, pouvait irriter ou fatiguer. Autour de lui, il arrivait que l’air se charge de nervosité, perde de sa paix. À beaucoup, Louis faisait peur.
Michel Layaz reconstitue le puzzle de la vie de Louis Soutter, en résonance avec l’hypersensibilité de son héros. Il ausculte les réactions probables de son entourage, affirme, tâtonne, joue avec l’histoire. Généralement taquine et vagabonde, l’écriture de Michel Layaz, dès qu’il s’agit de la peinture de Louis Soutter, se densifie, prend corps et chair. On sent toute la fascination de l’auteur pour cette œuvre et cette force créatrice inextinguible. Louis Soutter n’assimile aucune forme de cadre, dissout les murs, capte les vibrations de tout ce qui l’entoure pour en faire art.
Que voyait-on de si terrible sur ce papier ? Les dessins de Louis, quand on sait qu’ils réussissent, […] par leurs ondes et leur fluide, à mettre à nu notre chair, à éveiller sur notre peau des sensations anciennes qui appartiennent à un temps autre, celui d’une plénitude perdue, ou qu’ils créent dans l’esprit des images incertaines, heureuses ou honteuses, ensevelies sous le maçonnage moral, pourquoi continuer à les décrire ?
Un livre à l’image de son héros. Libre.
Ed. Zoé
Voilà déjà quelques mois que je n’avais plus ululé de bonheur, sauté partout en criant « oui, oui, oui, encore », pleuré à chaque page en disant « mais que c’est beau » et tout ça, à la découverte d’une écriture nouvelle, d’un univers, d’une histoire. Et pourtant, Hiver à Sokcho est bien peu spectaculaire, du moins en apparence. C’est que cette jeune auteur réussit quelque chose de tout à fait magnifique, travailler sur la simplicité, le non-dit, le mystère. Ça pourrait être ennuyeux et glacé, c’est puissant et évocateur, traversé par des courants de vie, des lignes de force, le feu sous le givre.