Chronique livre : Dôme

de Stephen King.

domeQuand on n’a pas de vacances, il faut bien faire comme si pour tenir le coup, et quoi de mieux qu’un double pavé signé Stephen King. Les habitants de Chester’s Mill n’ont pas de chance ce matin-là : ils sont instantanément coupés du monde par une barrière invisible et quasiment étanche. Cette barrière suit pile poil la limite de la commune et son apparition soudaine entraîne quelques petits incidents : accidents de l’air et de la route, amputations… Que se passe t-il alors dans cette micro-société fermée ? Continuer la lecture de Chronique livre : Dôme

Chronique livre : Les travailleurs de la mer

de Victor Hugo

Enorme, énorme, énorme, c’est le mot qui vient à l’esprit lors de la lecture des Travailleurs de la mer. C’est qu’il n’y va pas avec le dos de la chaloupe Maître Hugo, son roman déborde de tout, de génie, d’audace, de culture, parfois même jusqu’à l’overdose. Il faut dire qu’une histoire qui remplirait difficilement sa centaine de pages sous la plume d’à peu près n’importe quel écrivain, en prend environ six cents sous la plume d’Hugo. Il faut donc les remplir ces pages, et Victor Hugo n’a jamais été avare en remplissage culturel. Il s’en donne d’ailleurs à cœur joie, pour qui est amateur, on saura donc tout (si on ne saute pas quelques centaines de pages) sur les bateaux, l’histoire de Guernesey, les propos des gens du cru, les récifs …

Mais à côté de ça (il faut tout de même une certaine dose de patience), Les travailleurs de la mer est une histoire romanesque assez extraordinaire, et complètement déchirante. Gilliat, l’homme-ours tombe amoureux de la jolie Déruchette, qui, un jour de neige, sans doute pour s’amuser, a tracé dans la neige avec son doigt, le nom de Gilliat. L’homme y voit sans doute un signe, un appel, et de ce moment, tombe éperdument amoureux de la petite coquette. Il ne connaît rien aux femmes, n’ose pas l’aborder, joue du biniou sous ses fenêtres. Et quand le bateau à vapeur du tuteur de Déruchette s’encastre dans des rochers inaccessibles, Gilliat n’hésite pas, il part seul, équipé de peu, pour sauver la machine. L’enjeu de cette tentative de sauvetage désespéré, la main de Déruchette.

Commence alors une espèce de Kho-Lanta hugolien, un Robinson Crusoé version dure, et c’est magnifique. D’accord, rien ne nous sera épargné des détails du sauvetage, mais l’énergie mobilisée par Gilliat, et surtout le rythme imposé par Hugo sont colossaux. On est happé par les moindres faits et gestes de cet homme, fou d’amour, et c’est grandiose. Je ne vous raconte pas la fin, j’ai chialé pendant trois jours.

Le roman vaut bien sûr également par ses nombreuses allusions politiques, la précision de ses détails historiques. Mais laissez-moi être une vraie midinette, et ne retenir de cette histoire qu’un amour fou, malheureux, et beau comme la nuit.

Chronique livre : L’année de la pensée magique

de Joan Didion.

Ah la la très difficile d’écrire cette chronique. Si j’étais un tantinet superstitieuse, je dirais que les malédictions existent et qu’il y en a une qui plane par là. C’est une amie très chère, fort cultivée et au goût très sûr qui m’a offert ce livre. Et chaque fois (ou presque) qu’elle me conseille un livre, après l’avoir entamé avec gloutonnerie, force est de constater qu’il me tombe des mains. Celui-là devait être le livre qui rachèterait tous les conseils précédents, celui que je ne pouvais pas ne pas aimer. Bon c’est encore loupé. N. ne nous décourageons pas, je suis sûre qu’un jour ça marchera.

Ne connaissant pas du tout Joan Didion, c’est d’un oeil totalement neutre que j’ai entamé L’année de la pensée magique (titre déjà pas terrible me semble, mais bon). Cette année-là donc, Joan Didion n’a pas vraiment eu de chance : elle perd son mari d’une crise cardiaque, et sa fille tombe gravement malade. Visiblement cette grande intellectuelle est une femme forte, genre une super-woman, et le deuil provoque chez elle des phénomènes dont elle n’a pas l’habitude : retours en arrière continuels, incohérence du comportement… ce qu’elle supporte avec beaucoup de difficulté. Ne comprenant pas ce qui lui arrive, elle se plonge dans des ouvrages sur le deuil pour essayer d’analyser ce qui se passe en elle. Le livre devient alors une suite quasiment ininterrompue de digressions sur la vie en commun de Didion et de son mari, entrecoupées de références sur le deuil, ou sur la vie en général.

Ecrit un ans après la mort de son mari, L’année de la pensée magique est clairement une catharsis pour l’auteur, incapable de faire face à ses émotions (qui semble d’ailleurs plus encline à analyser ses émotions qu’à les vivre pleinement). La démarche est totalement personnelle, tout à fait respectable, et probablement salvatrice pour Didion. Malheureusement, elle nous propose de lire ses états d’âme, ou plutôt ses pensées et réflexions. Et c’est là que ça coince. Didion écrit pour elle, pas pour ses lecteurs, dans une espèce de monologue intérieur décousu. Rameutant dans ses propos ses connaissances et amis (visiblement nombreux), ses références culturelles (visiblement nombreuses), ses souvenirs avec son mari (visiblement nombreux), elle n’ouvre jamais la porte au lecteur, écrivant de manière opaque, obscure, absconse (oui tout ça à la fois). On est complètement perdu, on ne comprend rien au message qu’elle veut nous transmettre (ou plutôt à ce qu’elle cherche à éclaircir en elle), on relit les pages vingt fois pour essayer de discerner ce qu’il y a à extraire de son verbiage chichiteux, et qui apparaît au final assez prétentieux. Le personnage de Didion, au lieu d’apparaître émouvant dans son deuil et sa quête de lumière, semble assez antipathique : superwoman à qui tout a réussi dans la vie, visiblement peu capable de se remettre en question ou d’écouter les autres, d’éprouver de l’empathie pour les autres et qui, pour la première fois de sa vie est confrontée à un drame. Son niveau d’auto-analyse (pour ce que j’ai pu en comprendre, vu que je n’ai pas compris grand chose) est incroyablement faible (oh lala perdre quelqu’un, ça fait péter les plombs. Ah bon ?), et n’est nullement compensé par une écriture intéressante.

On aurait aimé un peu plus de coeur, de sentiments intimes, de tripes, au lieu de toutes ces digressions. On se demande bien ce qui a pu pousser l’auteur à vouloir publier ce texte, fort respectable dans sa démarche de tentative de guérison, mais trop personnel et superficiel pour vraiment raisonner au coeur, à l’intime et l’universel du lecteur. Déception déception. Allez, la prochaine fois sera la bonne.

Chronique livre : Le Bûcher des vanités

de Tom Wolfe.

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Là, tu cherches le rapport avec le titre hein ?
J’aime bien le mystère parfois. Clique.

Il y a vraiment des gens qui ne doutent de rien, et qui ont raison : sortir un premier roman de 900 pages sur la pourriture du monde c’est quand même sacrément couillu. Le Bûcher des Vanités est assez hallucinant de par la maîtrise du récit et de la construction. Malgré quelques longueurs, le livre tient méchamment la route, et si on a parfois envie de le jeter à travers la pièce c’est surtout à cause de ses personnages, tous plus veules les uns que les autres. Parce que oui, lire le Bûcher des vanités ne donne pas forcément une vision de l’humanité complètement sereine, ni une patate d’enfer. C’est un catalogue des pires tares de l’Homme concentrées en quelques personnages : mégalomanie, soif du pouvoir, lâcheté, aveuglement, superficialité… et j’en passe. Ce qui interloque surtout, c’est que ce livre, sorti pourtant en 1987 n’a pas pris une seule ride. J’irai même plus loin en disant qu’à l’heure actuelle, post (et pré ?) crise mondiale, il serait même en deçà de la réalité.

Un trader (comme on dit aujourd’hui) et sa maîtresse percutent un gamin noir dans le Bronx et s’enfuient. Délit de fuite donc. La mère du gosse, trouve du soutien auprès d’un révérend noir influent et retors. La police et le substitut du procureur, sous l’influence puissante des médias et des élections toutes proches dénichent le trader et trouvent en lui, non seulement un symbole de l’impartialité de le justice, mais surtout un parfait bouc émissaire. Oui, parce qu’en fait, ce n’était pas lui au volant… C’est donc une totale toile d’araignée dans laquelle est embrouillée le trader et plus il se débat moins il s’en sort.

C’est d’une drôlerie noire dévastatrice, mais le Bûcher des vanités nous livre un monde dans lequel il n’y a rien à sauver. On est incapable d’éprouver la moindre sympathie pour un seul des personnages tant ils sont odieux chacun dans leur style : les riches n’ont qu’une envie, devenir encore plus riches en écrasant la gueule des autres (genre Rolex vous voyez ?). Les classes moyennes convoitent le mode de vie de riches (argent, maîtresses, …) etc… A la fin du livre, j’avais envie de revoir un épisode de Casimir.

Un (long) moment passionnant donc à la lecture de ce bouquin, mais pas forcément un « bon » moment. Vous suivez ?

Chronique livre : Siddhartha

d’Hermann Hesse


J’en connais un qui a atteint le nirvana ! Clic.

Un bien beau roman initiatique que ce petit bouquin paru en 1922. Siddhartha, un jeune homme, fils de Brahmane cherche sa voie : à travers le jeûne et le pèlerinage d’abord, puis la vie bourgeoise ensuite. Dégoûté de lui-même, il trouve refuge au bord de la rivière et partage la vie d’un passeur silencieux. C’est à ses côtés et après avoir vécu une douleur immense qu’il atteint finalement la plénitude, en abandonnant son orgueil et sa quête. C’est en cessant de chercher qu’il trouve enfin ce qu’il n’attendait plus.

C’est un magnifique chemin, l’apprentissage de la simplicité. Hesse nous plonge dans une Inde fascinante, aux multiples visages, empreinte tout autant de spiritualité que de matérialisme. A chaque étape de l’évolution de Siddhartha, on se demande quelle sera la suivante, impatient de connaître son cheminement, et par là même, sans doute, la recette du bonheur.

Mais Siddhartha refuse toutes les doctrines, et préfère écouter l’eau couler. Ça me plaît. Superbe.