de Takeshi Kitano.
Au début, je me suis vraiment demandée ce que je foutais là. Mais qu’allais-je faire dans cette galère ? Mais pourquoi donc aller voir un film de yakuzas ? L’impression s’est cependant assez vite dissipée. Non pas qu’Outrage soit un film génial, mais il contient suffisamment de scènes et d’éléments intéressants pour maintenir éveillé le spectateur le plus bougon.
Outrage, c’est un peu Iznogoud chez les nippons. Le principe est simple, plusieurs gangs de Yakuzas, dont les chefs sont vieillissants, se lient, puis s’entretuent. A la fin, il n’en restera plus qu’un, ou pas. Bon, sur ce thème fort peu passionnant, Kitano réussit un film qui trimballe une espèce de millième degré, de grande mélancolie, d’humour crépusculaire désabusé.
C’est à la fois une sorte d’hommage et de point final au film de yakuzas, Kitano s’ingéniant à dégommer l’ancienne génération avec méthode. Cette pléïade de mafieux vieillissants sont à la fois dangereux et pitoyables, tellement vains dans leurs aspirations, incapables de bâtir mais seulement de détruire. Le regard de Kitano sur ces pépés du crime et la jeune génération aux dents longues qui piaffe derrière eux a quelque chose d’assez distancié, presque tendre et paternel. Voyez comme vous êtes ridicules semble t’il dire à ses personnages. Et il y a une scène très belle où Kitano réchappe à une explosion, et on voit le bâtiment s’effondrer autour de lui, comme un monde qui s’achève.
Bon bien entendu, le film a son lot de scènes cracras, de la plus gore (une petite séance chez le dentiste assez musclée), à la plus cruelle (une pendaison motorisée à l’horizontale), à la plus marrante (une scène de cutter durant laquelle une bande de gangsters se gueulent tous dessus, inénarrable). Il y a un vrai sens artistique également au niveau de la composition de l’image, des couleurs (notamment ces scènes de nuits, grises et rouges), le film est assez beau et mélancolique. A côté de ça, il faut avouer qu’Outrage est un chouia mou du genou, et que, amputé de quelques dizaines de minutes, il aurait nettement gagné en efficacité. Mais l’efficacité ne semble vraiment pas la préoccupation principale de Kitano, plus intéressé à prendre son temps pour mieux tourner la page qu’insuffler un nouveau souffle à ce genre éculé. Un bel hommage, presque attendrissant (si je puis me permettre).