Chronique film : Un prophète

de Jacques Audiard.


Ok, c’est un peu facile, mais j’avais pas d’idée. Clique au lieu de râler.

Un prophète est un gros film français, le plus gros que j’ai vu depuis longtemps. La preuve, au générique de fin sont crédités pas moins de 6 serruriers. Ah, ça en bouche un coin ça, 6 serruriers pour un seul film. Un prophète sous ses airs de film sérieux et concerné est donc bien une superproduction, qui sort l’artillerie lourde pour séduire le spectateur et le critique bouche bée d’admiration. Et ça marche visiblement, puisque la critique est unanime, Grand Prix au festival de Cannes et tutti machin. Et il faut être honnête, le film est totalement irréprochable.

C’est une espèce de Scarface à la française, et dans l’univers carcéral, la réussite (sans décadence) magistrale d’un petit mec de rien, qui grimpe les échelons de la société en faisant profil bas. La mise en scène d’Audiard est très classieuse : tour à tour nerveuse et sèche, ou distanciée, il utilise à merveille ses décors depuis le fourgon de police des premiers plans (à travers les grilles on aperçoit des immeubles, et leurs petits fenêtres alignées, comme des cellules, belle mise en abyme) jusqu’à la prison, univers à la fois clos, mais en constante interaction avec l’extérieur. Dans ce décor s’ébattent des acteurs formidables, depuis Arestrup sur-jouant son rôle de parrain corse jusqu’à la caricature, symbole d’un monde bling bling révolu, à Tahar Rahim, gueule d’ange indéchiffrable, prenant de l’épaisseur au fur et à mesure du film, sans oublier tous les seconds rôles, parfaits. Côté son c’est moins brillant, on a connu Desplat nettement plus inspiré, sa musique est ici quelque peu mélasse. La prise de son est en dessous de tout, c’est simple, j’ai compris à peu près un mot sur quatre, et je soupirais de bonheur quand les personnages parlaient étranger, au moins, je pouvais me raccrocher aux sous-titres.

Malgré toutes ces qualités et ce défaut handicapant, je n’ai jamais réussi à rentrer dans le film. Sur les deux heures quarante, j’ai bien l’impression qu’il y a une bonne heure de trop. On ne peut pourtant pas reprocher à Audiard un côté moralisateur ici, contrairement à son précédent film. Le film évite le manichéisme, faisant du savoir et de la connaissance le carburant d’une réussite criminelle, et de son personnage de petite frappe un grand bandit, sans qu’aucun jugement moral ne fasse de l’ombre à cette ascension. Non, je ne sais pas pourquoi je n’ai pas pu rentrer dans ce film. Trop mâle, trop viril, sans doute, pas un sujet qui me touche particulièrement, et une mise en scène au final trop attendue pour m’avoir vraiment emportée.

Contrairement aux Cahiers, les passages les plus intéressants du films sont pour moi les décrochages de la réalité, la présence du « fantôme » de l’homme qu’a tué le héros, ce rêve de biches intrigant. Ces scènes ont de la présence, du corps, et poussent le film dans une direction qu’il n’ose pas prendre franchement. Frustrée aussi de ce que le film aurait pu être et qu’il refuse d’être vraiment. Un film qu’il serait de mauvais goût de ne pas aimer donc, mais qui m’a laissé sur le bord de la route une grande partie de son cours.

2 réflexions au sujet de « Chronique film : Un prophète »

  1. Encore une fois, je me disais après tout le battage que j’irais, et puis non, ça doit être plombé à mort, et puis j’ai envie de drôlerie en ce moment, et aussi que je prépare mon déménagement qui est pour samedi, et donc peu de temps pour tout ça.

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