de Christophe Dabitch
Chronique publiée initialement dans le numéro 35 de l’indispensable Revue Dissonances.
Pourrais-je vivre ici ?
Christophe Dabitch parcourt le tracé du 45e parallèle nord dans le département de la Dordogne. En ligne droite fictive, zigzag réel, azimut brutal adouci. Que cherche-t-il dans cette marche sur cette zone d’équilibre, à mi-chemin entre le pôle Nord et l’Équateur ?
Nous devenons des chiens ou des chats, nous cherchons une place.
La marche le mène à s’interroger sur le voyage, sur lui-même, sa place dans le monde, son rapport à la nature.
Le chêne m’ignore et je n’y peux rien.
Il faut se laisser porter sur le flot de ses pensées, au gré du franchissement interdit des clôtures, de pique-niques illicites dans des résidences secondaires désertes et manucurées.
En voyageant ici, ces noms qui marquent les étapes nous disent sans cesse un coin de terre dont nous sommes faits.
Dans une langue poétique et profonde, drôle parfois, Christophe Dabitch dresse aussi en creux le portrait d’un pays en transition (déprise rurale, réensauvagement, fragmentation des espaces), vestiges de gens du cru, néo-faux-ruraux, néo-vrais-ruraux, retraités du Nord, formant le petit peuple du 45e parallèle nord. Mais l’ancrage de ce pays dans sa/son pré/histoire se lit (sans forcément se comprendre) partout, dans chaque nom de lieu-dit traversé, de Tartifume au Grand But, en passant par le Petit But et la Cloppe.
Et vient une allégresse de la marche qui ressemble à l’emballement amoureux.
Le texte bouleverse aussi (surtout) dans ses intervalles, ses espaces, ses moments de pause, de doute, de fragilité. Il bute, avance, hésite, redémarre. Et nous avec lui.
Essayer d’être immobile. […] Être immobile. […] Se lever, remonter la rivière.
Ed. Signes et Balises