(1959) de Ranald MacDougall
Film d’anticipation improbable de 1959, Le monde, la chair et le diable est un machin curieux, dont je n’avais jamais entendu parlé, mais qui, sans aucun doute, est tombé entre les mains de Danny Boyle, avant qu’il tourne son « 28 days later ».
Ralph , mineur noir, met une semaine à sortir d’un tunnel effondré. Quand il pointe son nez dehors, plus une âme qui vive, il erre seul à travers le pays, jusqu’à un New York absolument désert, où il essaie de se reconstruire une vie. Le film est bâti de manière très précise en 3 parties bien distinctes (comme son titre et l’affiche d’ailleurs) mais un peu inégales.
L’errance de Ralph dans ces décors esseulés est magnifique, et magnifiquement accompagnée par des cadrages surprenants et superbes. On ressent ce vide incommensurable, cette solitude qui pèse du plomb. Puis, une survivant pointe son nez. Commence alors une partie plus légère et vraiment drôle entre les deux compères, bourrée de vannes mignonnettes comme tout sur le fait qu’ils soient seuls au monde. Un homme, une femme, le trouble s’installe cependant, et au delà de la légèreté de leurs rapports, l’ombre du racisme plane au détour d’une phrase malheureuse de Sarah . A partir de là un vrai malaise commence à s’installer, jusqu’à exploser dans la dernière partie. Une troisième survivant apparaît, c’est un homme et il est blanc. Ralph, lui laisse le champ libre pour le coeur de la belle Sarah, ressentant trop le poids de sa couleur de peau. Sarah est tiraillée.
C’est cette troisième partie qui pêche un peu. Parfois extrêmement violente, plus dans les attitudes que dans les paroles d’ailleurs : on bourre les côtes deRalph avec une canne pour qu’il se retourne, on fait des plaisanteries sur ces talents manuels. C’est ce racisme « ordinaire » qui est bien rendu, et qui donne vraiment envie de hurler, d’autant plus qu’il y a une belle inventivité avec la caméra et les décors. Mais la fin est ahurissante de niaiserie, Ralph pose son fusil devant un monument aux morts, les trois lascars partent main dans la main, parce que finalement, tout le monde il est gentil et au générique, on n’a pas « The End », mais « The Beginning ». Berk.
Ce final gâche un peu cette belle idée, de concentrer l’attention sur trois personnes déconnectées de la société pour dénoncer les travers d’icelle , et à quel point l’humain répète à l’envie les schémas qu’on lui fout dans la tête. Très belle découverte cependant, et curiosité à découvrir.