Chronique film : Duel

de Steven Spielberg.


Seule, de nuit… Risquée non ?
Clique.

Superbe idée que d’avoir ressorti ce film sur grand écran, mon 14 pouces ne rendait pas justice à Duel, pourtant initialement réalisé pour la télévision. Première réalisation de Spielberg et premier coup de maître, on ressort du film totalement harassé par cette folle course poursuite angoissante car totalement gratuite. Un homme moyen, soumis à sa femme et à son boulot voit se « matérialiser » cette pression sous la forme d’un camionneur fou et de son engin énorme, sombre et tout pourri. Bon j’extrapole probablement les pensées de Spielberg à partir des premières scènes du film, puisque la plus grande partie de la pellicule fait état d’une situation complètement gratuite et d’autant plus effrayante justement qu’il n’y a aucune justification aux gestes du camionneur.

La maîtrise du jeune cinéaste (25 ans !) est déjà époustouflante. C’est audacieux dans le sujet (une menace gratuite d’1h30) dans les cadrages, l’image est très 70’s, assez belle dans son genre. Mais c’est surtout le montage qui époustoufle, ça va vite, très vite dans les scènes d’action et c’est vraiment au cordeau. Le réalisateur réussit à rendre « vivant » ce camion, très animal (après avoir détruit des cages à serpent, il se met à bouger comme un serpent jouant avec sa victime). C’est flippant à souhait. Et même les quelques fautes de points de vue de la caméra de Spielberg (effectivement, pourquoi placer de temps en temps la caméra sur le camion ?) ne réussissent pas à briser la grande réussite formelle qu’est ce film.

Osé comme sujet pour un premier film, casse-gueule et pourtant superbement réalisé. Très contente de l’avoir revu.

Chronique film : Salo ou les 120 journées de Sodome

de Pier Paolo Pasolini.


Plus de plaisir, clique là où ça fait mal.

Bon, je me suis fixée comme conduite de commenter tous les films que je voyais en salle. Mais là, je suis grave dans la merde. Bon, d’un côté, avec tous les nouveaux mots clés que je vais introduire, je pense que mon audience moribonde va connaître un petit mieux. Hélas, la quantité n’est pas la qualité…

Durant la république fasciste 4 « maîtres » accompagnés de 4 mères maquerelles exercent leur tyrannie sexuelle sur une flopée de jeunes nymphettes et éphèbes. Le film est découpé en un prologue (la capture des victimes) et trois grands chapitres (le sexe euh « normal », le sexe scatologique et le sexe sadique) et ça finit pas bien.

C’est très laid au niveau image, très frontal et plat niveau mise en scène, et deux-trois scènes sont difficilement soutenables (ça se confirme mes penchants scatos sont complétement atrophiés). Bon. Mais ça a quand même pris un sacré coup de vieux, aujourd’hui plus personne ne sort de la salle, et c’est avec un certaine indifférence qu’on suit ça : le baillement a pris le pas sur la grimace écoeurée. Salo est bien évidemment une critique brutale du fascisme, et en aucun cas un film porno : rien de bandant là-dedans. Il y a sûrement des analyses très profondes à en faire, mais je manque clairement de culture sur ce coup, et d’envie. Je passe mon tour.

Chronique film : Le monde, la chair et le diable

(1959) de Ranald MacDougall

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Film d’anticipation improbable de 1959, Le monde, la chair et le diable est un machin curieux, dont je n’avais jamais entendu parlé, mais qui, sans aucun doute, est tombé entre les mains de Danny Boyle, avant qu’il tourne son « 28 days later ».

Ralph , mineur noir, met une semaine à sortir d’un tunnel effondré. Quand il pointe son nez dehors, plus une âme qui vive, il erre seul à travers le pays, jusqu’à un New York absolument désert, où il essaie de se reconstruire une vie. Le film est bâti de manière très précise en 3 parties bien distinctes (comme son titre et l’affiche d’ailleurs) mais un peu inégales.

L’errance de Ralph dans ces décors esseulés est magnifique, et magnifiquement accompagnée par des cadrages surprenants et superbes. On ressent ce vide incommensurable, cette solitude qui pèse du plomb. Puis, une survivant pointe son nez. Commence alors une partie plus légère et vraiment drôle entre les deux compères, bourrée de vannes mignonnettes comme tout sur le fait qu’ils soient seuls au monde. Un homme, une femme, le trouble s’installe cependant, et au delà de la légèreté de leurs rapports, l’ombre du racisme plane au détour d’une phrase malheureuse de Sarah . A partir de là un vrai malaise commence à s’installer, jusqu’à exploser dans la dernière partie. Une troisième survivant apparaît, c’est un homme et il est blanc. Ralph, lui laisse le champ libre pour le coeur de la belle Sarah, ressentant trop le poids de sa couleur de peau. Sarah est tiraillée.

C’est cette troisième partie qui pêche un peu. Parfois extrêmement violente, plus dans les attitudes que dans les paroles d’ailleurs : on bourre les côtes deRalph avec une canne pour qu’il se retourne, on fait des plaisanteries sur ces talents manuels. C’est ce racisme « ordinaire » qui est bien rendu, et qui donne vraiment envie de hurler, d’autant plus qu’il y a une belle inventivité avec la caméra et les décors. Mais la fin est ahurissante de niaiserie, Ralph pose son fusil devant un monument aux morts, les trois lascars partent main dans la main, parce que finalement, tout le monde il est gentil et au générique, on n’a pas « The End », mais « The Beginning ». Berk.

Ce final gâche un peu cette belle idée, de concentrer l’attention sur trois personnes déconnectées de la société pour dénoncer les travers d’icelle , et à quel point l’humain répète à l’envie les schémas qu’on lui fout dans la tête. Très belle découverte cependant, et curiosité à découvrir.

Chronique film : Épouses et concubines

(1991) de Zhang Yimou

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Qu’Arte soit maudite pendant 7×77 générations d’avoir diffusé Épouses et concubines en français. J’en reviens toujours pas. Alors bon, ils disent bien « appuyer sur la touche A/B » de votre télécommande pour avoir la version originale ». Mais j’ai pas de touche A/B sur ma télécommande. J’ai une télé 17″ de plus de 12 ans d’âge. Voilà. Maintenant, on peut passer au film.

Je ne suis pas très objective, Épouses et concubines, c’est un de mes plus gros chocs ciné d’adolescente, vu en salle, enregistré en VHS et vu et revu jusqu’à extinction de la bande. Je n’en menais pas large de le revoir, peur d’être déçue, que le film ne soit gâché par une VF de merde. Et bien non, Épouses et concubines reste une pure merveille, un éblouissement de chaque image. Dans un décor minéral, où on ne survit qu’en se fondant au paysage, on paie très cher le fait d’être vivante. Visuellement, le film est un véritable choc. Entrelacements de bâtiments gris, labyrinthiques, touches de couleurs disséminés, répétition infinie des gestes rituels, lanternes, massage de pieds… Zhang Yimou sait créer la dépendance filmique, en nous plongeant dans cet univers quasi-hypnotique. Le plan sur les pieds de Gong Li, privés de leur massage est fantastique, rien que d’y penser, j’en ai encore des picotements sous la voûte.

Les femmes sont perdues dans un environnement qui les étouffent à la moindre velléité de liberté. Le maître, figure pourtant centrale, ne reste qu’une silhouette. C’est un marionnettiste, il reste dans l’ombre, mais tire pourtant bien toutes les ficelles. Pas déçue donc par ce nouveau visionnage, même si la VF m’a donné envie de hurler.

Chronique film : Il Bidone

(1955) de Federico Fellini

Autant vous le dire de suite, je ne suis pas une spécialiste de Fellini, je n’ai vu aucun de ses « grands » films (j’entends déjà les huées). Mais bon, je me rattrape, la preuve. Cependant, je dois dire que Il Bidone ne m’a pas du tout convaincu.

L’histoire est pourtant intéressante. Une bande d’escrocs sympathiques, mais nonobstant pourris, des sortes d’anti – robin des bois, se plaisent à arnaquer les pauvres gens, à la campagne ou dans les bidonvilles romains, afin de s’en foutre plein les fouilles. Le film, assez bancal, ne décolle que dans les 20 dernières minutes, malgré une ouverture intrigante (la première volerie), malgré de jolies retrouvailles entre une jeune fille et son escroc de père, malgré le sourire et la tristesse de Masina . On ne sait trop quelles étaient les intentions du maître, qui filme fête avec tiédeur, et tragique avec mollesse, sans bien creuser l’amoralité de ses héros. Manque d’inventivité, et de fil conducteur.

Les vingt dernières minutes, par contre, beaucoup plus maîtrisées permettent au film de ne pas sombrer. La dernière arnaque est l’occasion d’une fausse-vraie prise de conscience de ses actes par l’escroc, qui ne l’emportera pas au paradis (quel salaud quand même, la paralytique, elle ferait fondre un silex). D’un seul coup, Fellini s’amuse avec ses cadres, dans un excellente scène d’agonie sur un éboulis.

Film triste et un peu vain, malgré quelques fulgurances (je cause bien hein ?), Il Bidone, n’est toujours pas ma clé d’entrée dans l’univers Fellinien. Mais j’ai encore du taf.