de Yasmina Khadra
Amine, un riche Israélien d’origine arabe exerce sa profession de chirurgien dans un hôpital de Tel Aviv. C’est un homme qui a réussi, bon boulot, bien marié, belle maison, il a su passer outre les difficultés d’être arabe à Tel Aviv. Jusqu’au jour où, sa femme Sihem, si discrète, intégrée et timide se bourre d’explosifs et se fait sauter dans un restaurant bondé de la ville. Après une phase de négation, Amine sombre dans l’incompréhension totale de ce qui s’est passé. Lui qui a bâti une cage dorée pour et autour de son épouse idéalisée, n’a rien vu passer de l’essentiel, de l’extérieur, du monde qui palpite et qui souffre au bord de son univers. Il se lance alors à la poursuite d’une explication plausible à cette incompréhensible geste, croise misère, injustices et lutte pour survivre, et retrouve son passé qu’il avait soigneusement enfoui sous une jolie couche de vernis.
Ce n’est pas par le style que ce bouquin est accrocheur. Ampoulé, métaphorique et poético-chichiteux, il navigue entre mauvais polar et bluette du dimanche, même si, à de très rares moments, un zeste de joliesse s’échappe de cet excès de verbiage.
Pour agaçant que soit ce travers, il faut avouer que les quelques 250 pages de cette courte histoire se dévorent. Les personnages sont bien campés, sans jamais être spécialement clichés. L’incompréhension du chirurgien, totalement imperméable aux explications que lui fournissent les terroristes est à ce point remarquable. Le formatage que lui a inculqué son statut de médecin israélien l’a coupé du monde réel, de ses origines. Pour lui, si sa femme s’est fait sauter le caisson, c’est parce qu’il n’a pas réussi à la rendre heureuse. Il ne peut pas imaginer une cause plus vitale, plus revendicatrice que les limites de son quotidien.
Les deux mondes s’affrontent, ceux qui souffrent, subissent, et n’ont plus rien à perdre, et ceux qui dominent, pas forcément consciemment, imposent, et pour qui les actes désespérés des premiers sont une raison supplémentaire d’étouffer les revendications. Cercle vicieux. Sans jamais excuser aucun acte de violence, et de tuerie, ou de fanatisme l’Attentat révèle une vérité assez dérangeante pour se sentir mal dans son mode de vie douillet et occidental. C’est déjà pas mal.