de Jeanne Benameur.
Un vieil homme dans une grande maison. Il était chirurgien, il avait une famille. Aujourd’hui il est seul, simplement aidé par sa gouvernante. Il s’appelle Octave. Octave embauche, pour une raison connue de lui seul trois femmes et un homme qui passeront chacun leur tour, quotidiennement, du temps avec lui. Pourquoi ces quatre là, recrutés avec minutie ? Qu’attend-il de ces personnes qui ne se connaissent pas et n’ont rien en commun ?
Il est ténu le fil entre le gnangnan et le sensible. Et c’est assez miraculeusement que Jeanne Benameur réussit à rester du côté du sensible sans jamais trébucher dans le gnangnan. Parce que tout le livre est basé sur le non-dit, sur la révélation progressive, sur le frémissement. Et c’est très périlleux tout ça. Nos cinq protagonistes ont des secrets, des blessures. Leur rencontre va servir de déclencheur, va leur permettre de se trouver ou de se retrouver. Octave a envie de créer des liens entre ces inconnus et lui-même, et, à sa manière de se reconstruire une famille. Une famille choisie, unie par quelque chose d’impalpable qui naît de la rencontre des corps et des esprits. Octave n’est pas croyant mais sa volonté donne naissance à quelque chose qui est de l’ordre du sacré, mais un sacré qui ne naîtrait pas d’un personnage supérieur et omniscient, mais de la friction des êtres, dans toutes leurs fragilités et leurs insuffisances.
Ca pourrait être horrible de sensiblerie, mais non, l’écriture de Jeanne Benameur réussit à trouver un équilibre certain. Malgré toute sa délicatesse, elle a cette volonté de se tourner vers la vie, l’énergie et l’accomplissement. Les points de vue changent, le rythme évolue au gré des découvertes, des personnages. Il y a un dynamisme suffisant pour ne pas faire plonger son livre dans une évanescence mièvre. Une bien jolie surprise.
Ed. Actes Sud
Une réflexion sur « Chronique livre : Profanes »