de Pierre Brunet.
C’est toujours un très grand plaisir de découvrir une maison d’édition toute jeune et déjà pleine de très belles promesses.
L’histoire de Daniel V., deuxième publication de cette maison, est une petite merveille. Pierre Brunet a vécu la guerre d’Algérie. De cette période, il garde le souvenir d’un ancien camarade, Daniel V. A peine croisé quelques jours, Daniel et son histoire ont pourtant eu des répercussions durables sur l’auteur. Des années plus tard, il se souvient et essaie de reconstituer le puzzle de cette très courte vie, à la fois à partir de ses souvenirs propres ou de choses racontées. Pierre Brunet aborde son récit de manière très modeste. Il s’agit bien là de souvenirs et donc d’images persistantes d’un passé à la fois précis et lointain. Nulle prétention d’exactitude ici, mais plutôt juste l’envie de raconter des souvenirs, parfois nets ou incertains, concordants ou discordants.
On retrouve ce type d’écriture du souvenir, que j’aime tant d’ailleurs, chez d’autres auteurs, comme récemment dans le très beau Autour de moi de Manuel Candré. Cette façon de procéder, pour subjective qu’elle soit, permet de développer une richesse et un pouvoir d’évocation incroyable. Débarrasser du souci d’une encombrante nécessité de véracité et d’objectivité, cette écriture du souvenir permet d’aborder énormément de sujets, mine de rien, au détour d’une phrase et d’une scène. Le portrait de Daniel V., c’est aussi l’histoire en creux de la guerre d’Algérie. Ce très court livre est ainsi d’une absolue richesse au regard de l’Histoire. On y apprend ou on retrouve beaucoup de choses concernant cette période sombre, les tortures, le désœuvrement, l’abandon, la menace, dans un condensé passionnant et particulièrement subtil. Pour réaliser ce tour de force, autant dire que la plume de Pierre Brunet est assez merveilleuse.
Une très belle découverte donc, et l’espoir que cette toute jeune maison d’édition continue sa route.
Ed. Signes et balises