Chronique film : Paris je t’aime

18 Courts-Métrages de plein de gens bien.

Autant vous le dire tout de suite, je ne suis pas de bonne humeur. Plusieurs raisons à ça.

Outre des raisons personno-personnelles, je fais une overdose de foot, j’en ai ras le bol de voir des milliardaires courir après un ballon, alors que les trois-quarts des millions de spectateurs qui se shootent au ballon rond ont du mal à boucler leurs fins de mois. J’en ai ras le bol, de voir des silhouettes aux yeux exorbités, avec des drapeaux français peints sur la gueule. Et pourtant, je n’ai rien contre le sport, rien contre les ballons (Allez le staaaade !), mais là vraiment, j’en ai marre.

Mais la raison essentielle, vitale, universelle pour laquelle je suis de mauvais poil, c’est que je me suis ennuyée au cinéma. Pas gentiment ennuyée, non vraiment ennuyée. C’est avec plein de bonnes intentions, et d’étoiles dans les yeux que je suis allée voir Paris Je t’Aime, film au concept original, puisque composé de 18 (ouh lala quand j’y repense, 18, putain, c’est long) courts-métrages de metteurs en scène d’origines géographiques et intellectuelles totalement différentes, bourré de stars et de pas stars, bref alléchant. Ca commence doucement, avec un petit Podalydès, poli, mignon, anodin quoi. Puis un jeune garçon tombe amoureux d’une fille voilée, voila, bon bon, c’est bien (pensant). Ensuite, avec le Gus Van Sant, on se dit qu’on tombe assez bas, donc qu’après, ça ne peut qu’être mieux (Gaspard Ulliel, essaies pas de te la jouer grunge, tu ressembles autant à Kurt Cobain, que moi à PJ Harvey). Heureusement, ce bas très bas est suivi par un haut très haut, un petit bijou de 5 min des Frères Coen, délirant, acide, décalé, qui égratigne bien profond, sans en avoir l’air, cette France toute entière tournée vers son passé culturel, sa pseudo culture de l’accueil, et sa réputation de pays de l’amûûûr (au fait Steve Buscemi que la force soit avec toi). On se dit que là, ça risque d’être dur de faire mieux, mais on a tort. Walter Salles et Daniela Thomas nous pondent un petit chef-d’œuvre de concision, une banlieusarde venant tout droit d’Amérique du Sud, se lève très tôt pour déposer son enfant dans une crèche déshumanisée, se tape des heures de transport en commun, pour aller faire la baby-sitter dans le 16ème, magnifique, vibrant, cruel. Malheureusement la suite est beaucoup moins convaincante. Je ne vais pas tous vous les passer, j’en ai déjà oublié la moitié. Je mets quand même une petite dédicace au court de Sylvain Chomet, petit ovni émouvant et finalement grinçant, sur la solitude des gens pas comme tout le monde. Allez pour être fair-play, je sortirais du marasme le court d’Isabel Coixet, pour Castellitto, et celui de Tom Tykwer, pour Natalie Portman.

Paris je t’aime ? Pas moi… une certaine envie d’aller élever des chèvres dans le Larzac ce soir.

Chronique film : The secret life of words

D’Isabel Coixet

J’ai beaucoup attendu pour vous parler de ce film. Je me décide mais sans être très sûre de moi. Je ne sais toujours pas quoi en penser réellement. La Vida Secreta de las Palabras (en VO, soit « La vie secrète des mots » en français) est un film qu’on a vraiment envie d’aimer, et dès le début. Ben oui, imaginez Sarah Polley, Tim Robbins, et Javier Camara (l’infirmier de « Parle avec elle » d’Almodovar), Antony and the Johnsons sur la BO, ça fait quatre arguments de poids.

L’histoire est belle, une infirmière venue de l’Est, au passé sombre et caché, est engagée sur une plate-forme pétrolière quasi-desaffectée pour s’occuper d’un blessé, au passé sombre et caché. Il est provisoirement aveugle et bavard, elle est sourde et mutique. Petit à petit, il s’apprivoisent.

Il y a de beaux personnages secondaires dans ce film, un scientifique solitaire qui compte les vagues, une oie vagabonde, un cuisinier un peu fêlé. Le duo d’acteurs Polley-Robbins est tellement beau et inattendu qu’on n’aurait même pas osé en rêver. Oui mais voila, question d’humeur (je venais de me faire doubler par une horde de mamies sûres de leur droit à la priorité), ou de temps, ou de je ne sais pas trop quoi, mais la mayo a eu un mal fou à monter. Tout le film est rempli de bonnes idées, trop peut-être. La surdité de l’héroïne est un levier émotionnel, mais elle est tellement peu crédible cette surdité (elle répond au téléphone, entend le moindre murmure) qu’elle est de trop. L’histoire en elle-même et les acteurs qui la servent suffisaient largement. Le trop est l’ennemi du bien. Heureusement, la fin, plus épurée, est un cran au-dessus. Elle laisse la part belle aux acteurs, rend la parole à Sarah Polley lors d’une scène bouleversante. A elle seule, cette fin rattrape un chouïa l’agréable ennui du début du film. Il y a également une voix off en ouverture et fermeture du film, qui en a laissé beaucoup sceptiques. Moi j’y ai vu quelque chose, j’ai cru comprendre quelque chose, mais j’ai l’impression d’être la seule. Donc si certains de mes lecteurs ont vu ce film, je ne serais pas contre connaître leur point de vue. A noter que le film a obtenu 4 Goya (l’équivalent des César en Espagne)… J’en reste baba.