Chronique film : Carlos, le film

d’Olivier Assayas.

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Tirer à fond, voilà un conseil dont Carlos n’a pas besoin.
Toi, clique. 

Passant outre toutes mes appréhensions je suis courageusement allée voir ce film fleuve de 2h45, version raccourcie du téléfilm en trois parties de plus de 5h. D’abord j’ai du mal avec les films longs en général, je n’aime rien tant que la concision, je trouve qu’Assayas n’est plus que l’ombre de lui-même depuis Clean, et pour finir le projecteur de mon cinéma dijonnais préféré “avait un problème” selon l’ouvreuse, mais qu’ ”ils n’y pouvaient rien, et que c’est comme ça” (vlan dans les dents, vous payez pas cher, alors fermez votre gueule si l’image est floue). Bref, voyez quand même comme j’étais motivée et pleine d’ouverture d’esprit pour recevoir le “chef d’oeuvre d’Assayas” dixit la presse.

Pas de doute, Carlos est un film sévèrement burné. Le problème c’est que moi, pas tellement. Carlos n’est certainement pas un mauvais film au niveau de la mise en scène. Assayas sait se servir de sa caméra, alternant mouvements fluides et nerveux, cadres audacieux, et c’est souvent très beau (flou hein à cause du problème de projecteur, mais beau). Le problème c’est que, à part ça… pas grand chose. Après une première heure assez tendue, on se demande vite “certes, oui, mais pour quoi faire” ? Honnêtement je n’ai pas compris l’intention d’Assayas : outre dresser le portrait de Carlos (ce qui personnellement ne me fait pas vraiment frétiller), on ne peut pas dire que le film ait grand chose à raconter. On suit donc Carlos, personnage peu sympathique, gros lard plein de bière, et on le regarde passer de militant révolutionnaire à mercenaire bling bling. Bon.

Le principal problème est le premier degré qui semble baigner tout ça. Le film se prend méchamment au sérieux, même quand il sombre dans le ridicule. Quelques scènes ne sont pas piquées des hannetons : Carlos se malaxant les couilles devant le miroir, parce que, putain, ça c’est un mec, ou la féministe allemande qui en deux oeillades taille une pipe à Carlos, parce que, putain, ça c’est un mec. D’un autre côté, c’est sa couille droite qui conduira à la perte du terroriste, comme quoi, si ça se trouve, Assayas a voulu faire un film de boules, mais sans se l’avouer. On assiste également à un spectacle trop “explicite”, entièrement tourné vers l’action : Assayas filme un nombre incroyable de trajets en bagnole, complètement inutiles. On dirait que, pour rendre lisible son film de 5h en 2h45, il l’a réduit à une trame “physique” et “géographique”, facilement compréhensible pour ne pas perdre le spectateur (on parle peu d’enjeux politiques ici, alors que visiblement la série creuse plus ce sujet, sans doute nettement plus intéressant). La direction d’acteur des seconds rôles me semble également souvent très douteuse, clicheteuse, on se croit de temps en temps dans des séries américaines médiocres, visages grimaçants et menaçants et idem pour l’utilisation de la musique, très premier degré (du gros son quand le suspense monte…). Par ailleurs, sans être une grande féministe, j’avoue pourtant que l’image de la femme véhiculée par le film est désastreuse : chaudasses (ahhh les préliminaires à la grenade explosive y’a que ça de vrai) ou hystériques, il n’y en a pas une pour racheter l’autre. Voilà.

Malgré ces défauts, Carlos est un film honnête, qui se laisse regarder sans trop scuter la montre grâce à une belle énergie. Pas sûre pourtant d’avoir l’envie de m’attaquer à la série, même si je la soupçonne d’être plus fouillée que ce résumé de texte à ras le bitume.

Chronique film : L’Heure d’été

d’Olivier Assayas.

Bon j’ai bien envie d’utiliser un joker pour ce film. Vous l’acceptez ? Non ? Vous êtes rudes. Bon, pas très objective sur ce film dont j’avais oublié (occulté serait plus juste) le thème en entrant dans la salle, car beaucoup trop proche de moi en ce moment. Je n’aurais jamais dû aller voir ça. Je vais faire vite donc. Pendant tout le film, Assayas a clairement bien fait son taf, c’est profond, ça sent le vécu, c’est intelligent. Malheureusement, ça ne m’a jamais touché, alors que j’aurais dû fondre en larmes dès le premier plan. L’ensemble de la distribution sonne creux comme une canette vide, c’est un peu trop poli, surfacique. On est chez des gens bien élevés, sans aucun doute. Les ingrédients sont tous là, mais il manque le tour de main. Heureusement une des dernières scènes, bourrée d’ados bougeards et vivants relève nettement la sauce, sauvant le film de sa thèse un peu lourde, frôlant avec le « c’était mieux avant », et le transformant en l’aperçu d’un avenir énergique. Allez hop, maintenant j’essaie d’oublier tout ça.

Chronique film : Boarding Gate

d’Olivier Assayas

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Au risque de paraître brutale, il faut bien avouer que Boarding Gate est un gros ratage. Le film lorgne sans l’assumer jusqu’au bout vers la série B, et nombre de scènes arrache in extremis des rires moqueurs. « Il va pas oser quand même ? » Ben si, il ose, mais pas assez. Malgré ses intentions, le film se prend très au sérieux, la pilule ne passe pas, et l’ennui gagne au bout de la … allez, je vais être gentille,… 10ème minute. Pleine d’échos catastrophiques sur la projection cannoise, j’étais toute prête à m’ériger en défenseuse du génie incompris, de l’artiste maudit. Mais là, non, je peux pas, y’a quand même des limites à la mauvaise foi.

Bon, on passe sans se retourner sur deux énormes erreurs de scriptes (des petits soucis de fermetures éclair et de sac à main), sur la myopie du chef op’ (à sa place, je m’inquiéterais), sur la musique vangelissienne à mort (il faut pendre l’inventeur du synthé, ça devient plus gérable là), sur l’histoire (ah y’avait une histoire ? oui oui, c’est un peu nikita sous ecsta). Je ne doute pas que tout ça soit fait exprès, le problème c’est que ça ne fonctionne jamais. Le film est bancal dans sa construction, avec une alternance de longs dialogues navrants, mal écrits, mal joués, et de scènes d’actions, un chouille meilleures, mais jamais captivantes, car souvent filmées dans un noir quasi complet.

Mais le gros problème, l’énorme erreur de ce film, c’est sa distribution. On passe rapidement sur Michael Madsen et Kelly Lin, qui, sans être géniaux, semblent avoir compris qu’ils étaient dans une série Z. On s’arrête une seconde sur Carl Loong Ng, qui a visiblement abusé de toxine botulique avant le tournage, et dont la mono-expressivité (l’oeil sombre et le sourcil froncé), font vite oublier qu’il est beau gosse, mais juste un peu casse-pompe. Et que dire d’Asia Argento… Sans jamais me faire hurler au génie, elle m’avait jusqu’à présent laisser un souvenir d’une neutralité parfaite. Son personnage dans Boarding Gate, est un témoignage vivant que le chaînon manquant existe bel et bien. Cheveu savamment gras mouillé (ah j’oubliais dans les erreurs de script le déplacement de la raie sur le côté), frusques effrangées, talons hauts trop grands, oeil sombre, moue boudeuse, chattemite pas nette, elle est surtout affligé visiblement d’un problème de mâchoire qui l’empêche d’ouvrir la bouche. Essayer de parler la bouche fermée en bougeant seulement la lèvre inférieure, vous verrez, c’est pas de la tarte, ça produit une espèce de cheucheuillement curieux. Les mots ainsi concaténés, sont peu distincts, et frôlent souvent le borborygme. Heureusement, ses partenaires semblent la comprendre. Une question d’habitude sans doute. Alors Asia Argento, pas dirigée ou mal dirigée, je ne sais, mais dès qu’elle apparaît à l’écran, on a envie de hurler « Rendez-nous Maggie Cheung ! ».

Pour finir sur une petite note positive, la caméra d’Assayas est joliment mobile et fluide, il filme notamment très bien les pieds qui montent ou descendent les escaliers…

 

Chronique film : Paris je t’aime

18 Courts-Métrages de plein de gens bien.

Autant vous le dire tout de suite, je ne suis pas de bonne humeur. Plusieurs raisons à ça.

Outre des raisons personno-personnelles, je fais une overdose de foot, j’en ai ras le bol de voir des milliardaires courir après un ballon, alors que les trois-quarts des millions de spectateurs qui se shootent au ballon rond ont du mal à boucler leurs fins de mois. J’en ai ras le bol, de voir des silhouettes aux yeux exorbités, avec des drapeaux français peints sur la gueule. Et pourtant, je n’ai rien contre le sport, rien contre les ballons (Allez le staaaade !), mais là vraiment, j’en ai marre.

Mais la raison essentielle, vitale, universelle pour laquelle je suis de mauvais poil, c’est que je me suis ennuyée au cinéma. Pas gentiment ennuyée, non vraiment ennuyée. C’est avec plein de bonnes intentions, et d’étoiles dans les yeux que je suis allée voir Paris Je t’Aime, film au concept original, puisque composé de 18 (ouh lala quand j’y repense, 18, putain, c’est long) courts-métrages de metteurs en scène d’origines géographiques et intellectuelles totalement différentes, bourré de stars et de pas stars, bref alléchant. Ca commence doucement, avec un petit Podalydès, poli, mignon, anodin quoi. Puis un jeune garçon tombe amoureux d’une fille voilée, voila, bon bon, c’est bien (pensant). Ensuite, avec le Gus Van Sant, on se dit qu’on tombe assez bas, donc qu’après, ça ne peut qu’être mieux (Gaspard Ulliel, essaies pas de te la jouer grunge, tu ressembles autant à Kurt Cobain, que moi à PJ Harvey). Heureusement, ce bas très bas est suivi par un haut très haut, un petit bijou de 5 min des Frères Coen, délirant, acide, décalé, qui égratigne bien profond, sans en avoir l’air, cette France toute entière tournée vers son passé culturel, sa pseudo culture de l’accueil, et sa réputation de pays de l’amûûûr (au fait Steve Buscemi que la force soit avec toi). On se dit que là, ça risque d’être dur de faire mieux, mais on a tort. Walter Salles et Daniela Thomas nous pondent un petit chef-d’œuvre de concision, une banlieusarde venant tout droit d’Amérique du Sud, se lève très tôt pour déposer son enfant dans une crèche déshumanisée, se tape des heures de transport en commun, pour aller faire la baby-sitter dans le 16ème, magnifique, vibrant, cruel. Malheureusement la suite est beaucoup moins convaincante. Je ne vais pas tous vous les passer, j’en ai déjà oublié la moitié. Je mets quand même une petite dédicace au court de Sylvain Chomet, petit ovni émouvant et finalement grinçant, sur la solitude des gens pas comme tout le monde. Allez pour être fair-play, je sortirais du marasme le court d’Isabel Coixet, pour Castellitto, et celui de Tom Tykwer, pour Natalie Portman.

Paris je t’aime ? Pas moi… une certaine envie d’aller élever des chèvres dans le Larzac ce soir.