Chronique livre : La promesse de l’aube

de Romain Gary.

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Premier degré : aube. A moins que ? Clique.

Je me doutais bien, à la lecture de La vie devant soi, que Gary avait un rapport particulier avec le concept de maternité, tout s’explique avec ce roman autobiographique, racontant la vie de son auteur, depuis son enfance jusqu’au décès de sa mère. Et il faut avouer que la vraie héroïne de se livre est la mère de Gary, et non pas Gary lui-même, bien que celui-ci, sous couvert d’une fausse modestie très amusante narre dans les grandes largeurs ses péripéties militaires et médicales.

Il serait un peu léger de dire que la mère de Gary était une mère poule, possessive, envahissante. Persuadée du génie de son enfant alors qu’il ne savait pas encore parler, elle clamait à qui voulait bien l’entendre (ou pas d’ailleurs !) que son fils (russe, et en partie élevé en Pologne) serait ambassadeur de France et l’équivalent de Victor Hugo. Pas moins. Voilà des attentes qui au moins ont le mérite d’être claires, mais qui devaient tout de même faire peser sur les épaules du jeune romain quelque pression. Mais ces attentes étaient assorties d’un amour absolument bouleversant d’une femme, actrice ratée, ayant eu un enfant tout seule, un peu tard, et dont toute l’énergie et l’affection se reporte sur le petit homme de sa vie. Loin de se laisser étouffer, fort d’une énergie à toute épreuve, Gary va tenter de combler les espérances de sa mère. Et c’est bouleversant.

Chronique livre : La Vie devant soi

de Romain Gary.

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Bon voilà qui me redonne un peu le sourire, après une série de livres au sérieux papal. Premier livre de Gary que je lis, et sans doute pas un bon choix pour débuter la découverte de ce géant (selon mon spécialiste préféré). Mais bast, c’est un sacré bon moment que ce livre, bien qu’il soit aussi roublard dans son sujet (un chtiot drôlement bousculé par la vie, ça fonctionne presque à coup sûr) que sa sortie sous pseudo et que sa distinction indue.

Momo, un jeune arabe, fils de pute au sens propre, est élevé par Madame Rosa, une juive réchappée des camps qui tient un foyer clandestin pour enfants de prostituées. Truculence du récit, Momo est un enfant intelligent, qui comprend et restitue les choses derrière le filtre de son éducation (particulière) et de sa compréhension (alternative). Le tout est très drôle et émouvant. On s’émerveille devant les trouvailles de langage de Momo (les femmes qui se prostituent se « défendent » dans sa bouche), et Gary sait tirer les larmes en maître. Rien à dire, c’est extrêmement efficace, chaque phrase prêtant à rire ou pleurer. L’acmé des sanglots provient de la vente par Momo de son chien qu’il adore (parce qu’il sait que, pour un chien, vivre chez Madame Rosa, c’est pas un cadeau à lui faire) : flot lacrymal garanti.

Mais voilà, au bout d’un moment, à force de faire recette, La vie devant soi finit par afficher clairement ses recettes. On sent par derrière l’écrivain, le faiseur, qui avant de débuter son travail s’est concocté un dictionnaire des expressions Momo, a soigneusement choisi les leviers narratifs qui feront naviguer le lecteur entre rire et pleurs. Les réflexions de Momo, sous couvert d’adolescence brassent des questions fondamentales : la vie, la mort, le bonheur, la solitude, la vieillesse, l’enfance, et sont à chaque fois tranchantes.

Virtuose, profond et sublime sans aucun doute, mais on ne peut s’empêcher justement de trouver ça un peu trop virtuose, un peu trop parfait, et renifler par là même l’entourloupe. Enfin, parfois, c’est quand même vachement bien de se laisser entuber de la sorte.