d’Abel Ferrara.
Un loft new-yorkais, Cisco et Skye y passent leur dernière journée avant la fin du monde. Skye médite ou peint et repeint une toile, Cisco s’interroge, assiste à un suicide et va prendre l’air. Tout autour les écrans (télévision, ordinateurs, téléphones, tablettes …) diffusent la rumeur d’un monde à l’agonie.
Curieux film que 4h44, sous la caméra du sulfureux Ferrara. On assiste à une partition en chambre, globalement apaisée malgré quelques soubresauts de la bête, qui se termine dans une lumière banche d’une grande douceur. Parce que ces deux là, Skye et Cisco, ont finalement accepté la mort qui vient, leur dernière journée sera à la fois exceptionnelle mais aussi très banale. Ils s’aiment, baisent, se disputent, mangent, communiquent. Et puis Skye travaille, tartine de couches successives de peinture une toile posée au sol, elle cherche c’est évident, on ne sait pas quoi, mais sa peinture mâchée et remâchée, foutraque et spontanée, avec ses rituels bien ordonnés, finit par prendre corps et direction. Cisco est plus fébrile, cherche du sens à l’apocalypse, rédemption et oubli.
Je ne sais pas s’il y a quelque chose à comprendre derrière cette exploration intime d’une catastrophe planétaire. Le spectateur me semble plus en position de récepteur sensoriel que pensant. L’omniprésence des voix du monde, provenant des innombrables écrans disséminés dans presque chaque plan, induit une sorte de transe hypnotique dans l’esprit du spectateur. On est assourdi par les murmures qui se chevauchent et s’entremêlent, comme le monde a été sourd aux cris d’alarme des chercheurs et autres experts, cassandres funestes, prévoyant depuis des années la fin des temps. Aujourd’hui, il n’y a plus qu’à accepter.
Le film est esthétiquement une pure merveille, qui joue avec les clairs-obscurs, dans un mélange de rouges et de verts profonds. Il se termine dans une dominante bleutée et purificatrice. Le grand message du film, si tant est qu’il y en ait un, serait sans doute qu’il n’y a que deux choses qui comptent vraiment, l’Art et l’Amour. Entre nous, comment ne pas être d’accord avec ça ?