Chronique film : Les bêtes du sud sauvage

de Benh Zeitlin.

lesbetesdusud-nbUne petite fille, Hushpuppy, vit dans le bayou de Louisiane avec son père instable et cardiaque, un père qui n’a de cesse d’apprendre à sa fille à être forte et indépendante. C’est une vie de bricole, une chèvre et trois poules, dure et sauvage, mais rien ne les fera partir de chez eux, pas même la tempête qui arrive et dévaste tout.

Le point de vue choisi est celui de l’enfant. Benh Zeitlin filme à hauteur de fillette, le monde dans lequel il nous plonge se veut à la fois poétique et quotidien, mélange de fantasmagorie enfantine et de réalisme social. La caméra, tout le temps en mouvement, ainsi que la lumière verte et mordorée, très belle, qui baigne le film, font penser à Trier, même si on sent que l’inspiration générale du réalisateur est plutôt à rechercher du côté de Malick, notamment par cette proximité avec la nature, l’utilisation de la voix-off et de la musique.

Alors parfois, tout cela fonctionne. J’ai aimé la sauvagerie de certaines scènes, de cette gamine toute en crinière qui se met à hurler comme une bête fauve, oisillon en liberté qui court dans la lumière, ou petit mammifère suicidaire qui nage vers le grand large pour retrouver sa mère. Certains excès fantastiques du film m’ont également touchée, justement par leur côté excessif et naïf : ces glaciers qui se disloquent, libérant les bêtes sauvages, signant ainsi la fin du monde tel que Hushpuppy l’a toujours connu.

Mais globalement, le film souffre de ses partis-pris pas toujours bien dosés : j’ai vite eu une overdose de cette voix-off, tout bonnement inintéressante, de cette musique complètement envahissante, de cette caméra qui bouge tout le temps. Le dynamisme des personnages suffisaient largement à insuffler de l’énergie au film, qu’il n’ait été besoin d’utiliser en permanence une caméra à l’épaule. Benh Zeitlin n’a pas fait suffisamment confiance à son image, souvent très belle, et au magnétisme de ses comédiens, la petite Hushpuppy en tête. Et puis, en toute honnêteté, je crois bien n’avoir pas compris du tout ce que voulait nous raconter Zeitlin avec son histoire.

Pour les amateurs de littérature, vous pouvez vous plonger dans le très beau Bois Sauvage, de Jesmyn Ward : ça se passe dans le même milieu, également au moment de Katrina, et il y est aussi question d’enfance et de maternité. C’est d’une poésie sauvage superbe, et contrairement au film, c’est magnifiquement abouti.

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