de Kelly Reichardt.
C’est un vrai plaisir que de retrouver le cinéma de Kelly Reichardt après sa fascinante dernière piste. Deux gamins aux convictions écolos extrêmes décident de faire sauter un barrage. Leurs motivations, on en saura rien, à part le prétexte bien sûr écologique, mais qui clairement n’explique pas tout.
Ici, pas d’effets sensationnels, ils surmontent quelques obstacles, font péter le truc et doivent ensuite vivre avec leur geste. Ce qui est magnifique, c’est ce refus absolu d’explication. La caméra de Kelly Reichardt n’est clairement pas là pour expliquer, juger, mais pour accompagner ses personnages. C’est quasiment au spectateur de faire son film, il n’y a ici nul pop-corn prémâché, nulle volonté de verser dans la psychologie. Juste ce qu’il faut de dialogues, finalement peu de scènes, pas beaucoup de plans.
Le film possède cependant une tension assez incroyable et un rythme interne qui maintiennent le spectateur sur la brèche. La réalisatrice réussit ce tour de force de faire naître l’angoisse avec une énorme économie de moyens, à la manière des meilleurs films de genre. Le spectateur est complètement scotché, attentif comme les personnages aux moindres bruits, attitudes des gens qu’ils croisent. Tout ce qui les entoure peut être potentiellement une menace à la fois pour l’exécution de leur plan et, après le dynamitage, contre leur liberté. Le film dure 1h50 et semble durer moitié moins. Kelly Reichardt a trouvé dans ses acteurs les interprètes idéals pour rentrer dans son univers, Jesse Eisenberg et Dakota Fanning sont jeunes, inconscients, des pages blanches qui se remplissent soudainement.
Ultra-maîtrisé, tendu comme un arc, Night Moves démontre encore une fois le talent unique de sa réalisatrice. On sautille de joie et d’une foi renouvelée dans le cinéma.