d’Alexandr Sokurov.
Autant vous le dire tout de suite, Faust constitue sans doute ma pire expérience de cinéma. Une très longue et très douloureuse agonie de 2h15. Je n’ai pas souffert aussi dans une salle depuis [Rec]. Alors pourquoi une expérience physiquement autant éprouvante ? un rejet aussi total de ce film ?
La première explication qui me vient à l’esprit, c’est cette esthétique hideuse. Certes on dirait parfois du Rembrandt, mais passé à la sauce Instagram : filtres verdâtres, distorsion, ou “effet Orton”, tout est d’une laideur absolue, et ce n’est pas tant le contenu des images (pourtant parfois peu ragoûtant) que cette artificialité totale et prétentieuse qui soulève le coeur. On pense souvent à Lars Von Trier, Melancholia pour l’esthétique, et l’Hôpital et ses fantômes, pour la créature diabolique et déformée. Mais là où le maître Trier atteint le génie pur (rien de gratuit dans ce qu’il fait), Sokurov s’amuse à changer ses filtres, sans trop savoir où tout cela va le mener (nulle part ?). Même les rares belles images du film se retrouvent ensevelies dans tout ce fatras photographique (le chef-op est celui d’Amélie Poulain, ai-je besoin d’en dire plus?). Bref, c’est kitsch, moche et franchement désuet, et non, on n’est pas obligé de filmer flou et tordu un personnage pour signifier le trouble de celui-ci.
Par ailleurs, le film a un côté complètement hystérique à la Fellini : personnages toujours en mouvement, maladroit jeu des corps, et surtout ces dialogues incessants post-synchronisés qui tombent à côté deux fois sur trois. Ce parti-pris rajoute au caractère artificiel du film. Imaginez Il Bidone, en costumes XIXème, filtré photoshop, et doublé en allemand. Oui, je sais ça fait peur, et bien c’est dans ce cauchemar que m’a plongé Faust. Sur la fin du film, le réalisateur se met à lorgner du côté de Murnau et Le Seigneur des Anneaux, créatures pas belles, parcours initiatique dans des montagnes sombres… On ne lui en veut pas trop, in extremis, ça arrache un sourire (mais était-ce vraiment le but ?).
Alors après tout ça, vous expliquer ce que le film raconte, sa portée philosophique, sa puissance métaphorique, vous comprendrez bien que j’en suis incapable. Faust m’est tellement tombé des yeux, physiquement malmenée par l’image et les dialogues, que j’avoue donc être complètement passée à côté de ce film salué par une critique énamourée et quasiment unanime. En ce qui me concerne, je vais peut-être me mettre un DVD de Depardon, ça va me laver le corps et l’esprit.
Une réflexion sur « Chronique film : Faust »