Chronique film : Deux jours, une nuit

de Jean-Pierre et Luc Dardenne.

deuxjoursunenuitUne femme sort de dépression et perd son travail : à l’issue d’un vote ses collègues lui ont préféré leur prime annuelle. A la peine de la maladie dont elle se sort tout juste et dans laquelle elle replonge aussitôt s’ajoute la peine de la perte de son travail. Épaulée par son mari en or et une collègue fidèle, elle tente de convaincre ses collègues de renoncer à leur prime.

Elle, Sandra, c’est Marion Cotillard, et tout le début du film semble assez mal aisé, la mise en scène rigide, paralysée par l’actrice. Marion Cotillard n’y est pour rien, elle est très bien, mais elle est Marion Cotillard et la caméra des frères semble se tenir à distance, ne pas réussir à rentrer dedans comme elle le fait habituellement. Et puis au détour d’un plan sur le visage de Sandra, il y a un déclic, une émotion terrible qui naît et qui ne lâchera pas. L’actrice illumine le film, son visage et tout son corps reflètent la lutte intérieure qu’elle mène. Car plus que la reconquête d’un travail, Deux jours, une nuit est plutôt un film-métaphore sur la reconquête de soi-même, sur la renaissance à soi-même. C’est un parcours personnel, un combat, une remontée vers la lumière après des semaines dans les ténèbres.

La lutte de Sandra sert également de révélateur des comportements humains, des plus bas aux plus courageux. La galerie de portraits que constituent ses anciens collègues expose des êtres tour à tour bouleversants ou mesquins, voire violents, mais tout ça sous-tendu par un fond de misère sociale et de précarité qui exacerbe les peurs, le repli sur soi-même. Plus qu’un film de mise en scène, la présence d’une star comme Marion Cotillard transforme le film en un film d’acteur. Même si le contexte social est présent, on n’est pas ici, comme habituellement chez les Dardenne dans un film social à proprement parler.

C’est plutôt réussi, même si parfois un peu caricatural, et il est difficile de ne pas être touché par le parcours de Sandra, à la fois singulier et universel qui fait forcément écho quelque part. Malgré tout, ce n’est pas ce que je préfère dans le cinéma des frères. Je les préfère moins intérieurs, sans doute moins intellectuels et conceptuels, et plus viscéraux.

Réelle évolution ou parenthèse, Deux jours, une nuit, est en tous cas un épisode singulier de la filmographie des Dardenne.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Time limit is exhausted. Please reload the CAPTCHA.

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.