de Ken Kesey.
Une rivière lisse, d’apparence calme, qui dissimule le cruel biseau de son courant sous une surface lisse…apparemment calme.
C’est mon livre monstre de l’année, celui que j’ai mis six mois à lire parce que tout simplement j’avais envie de le lire “bien”, j’avais envie qu’il dure encore et encore. Et quelquefois j’ai comme une grande idée de Ken Kesey est un roman total, omniscient, omnipotent, dans lequel on est aspiré, immergé et par lequel on est mâchouillé, dévoré, englouti .
L’auteur ancre d’abord son histoire dans un territoire à l’identité forte, la côte nord-ouest des Etats-Unis, sa pluie, sa forêt, sa pluie, sa rivière, sa pluie, ses bûcherons, sa pluie, ses crues, sa pluie et ses odeurs de moisi. Le décor imbibe le lecteur, pénètre sa chair pour atteindre ses os. Dans ce décor grandiose et menaçant s’ébattent une multitude de personnages, tous gravitant autour de la famille Stamper. Les Stamper, une famille de bûcherons biberonnée à l’Amérique, une famille survivante, self-made, ses hommes, la hache entre les dents, qui épousent des femmes un peu trop belles pour eux. Mais l’époque change, le demi-frère revient de la ville, avec sa poésie, sa constitution fragile et surtout sa rancoeur. Au drame familial déchirant se superpose le drame social et économique, car oui l’époque change vraiment et l’or n’est plus dans le bois.
Ken Kesey écrit son roman-fleuve comme on compose une partition, chaque personnage a sa voix que l’auteur capte et retranscrit. Ces voix s’entremêlent souvent dans un concert désordonné et pourtant millimétré. Fabuleuse écriture, libre et maîtrisée qui n’hésite pas à digresser, à se perdre sans pourtant perdre son fil. La dureté de ces vies, la nature fascinante mais angoissante ne viennent jamais à bout de la formidable poésie et surtout de l’énergie vitale de cette écriture. Un chef-d’œuvre organique.
Ed. Monsieur Toussaint Louverture.
Il y a un signe qui ne trompe pas: quand un lecteur veut ralentir, aller doucement, pour « savourer »! J’ai entendu beaucoup de bien de ce livre, mais c’est vrai que sa longueur m’intimide…!
Il ne faut pas être intimidée. Parfois on essaie, on échoue, on réussit, ce n’est pas important. L’important c’est l’envie, la curiosité, l’appétit ! J’ose le dire, c’est un chef d’oeuvre. Pas forcément facile, mais quel chef d’oeuvre l’est ?